Des généticiens américains ont manipulé l’expression d’un gène dans une plante afin de la rendre plus résistante aux changements environnementaux, et ont constaté que celle-ci était capable de transmettre cette particularité à sa progéniture sur plusieurs générations. Explications.
Une condition transmissible sur plusieurs générations
Comme tout bon parent, il s’avère que les plantes s’appuient sur leur propre expérience pour apprendre à leur progéniture comment surmonter les moments difficiles. Les facteurs environnementaux guidant l’évolution, il est logique que les plantes soient non seulement capables de s’adapter elles-mêmes aux conditions changeantes, mais puissent transmettre également ces stratégies pour donner à la génération suivante une longueur d’avance.
On sait depuis longtemps qu’un gène appelé MSH1 joue un rôle clé dans la résilience des plantes. Dans le cadre de cette nouvelle étude présentée dans la revue Nature Communications, une équipe de la Penn State University a découvert que sa désactivation chez les plantes d’Arabidopsis les aidait à réagir aux périodes de stress, telles que la sécheresse ou les vagues de chaleur. Ces plantes ont utilisé plusieurs stratégies d’adaptation, notamment en ajustant leur croissance, en limitant la quantité de biomasse poussant en surface, en modifiant la façon dont leurs racines poussent et en retardant le moment de leur floraison.
Mais la découverte la plus intéressante reste probablement que ces réactions peuvent être transmises à cinq générations futures. L’équipe a découvert que si une plante mère avait traversé des conditions stressantes, les mêmes comportements d’adaptation pouvaient se manifester chez certains de ses descendants.
« Nos travaux ont montré que cette condition de mémoire était héritable par la progéniture mais n’intervenait que pour une certaine proportion de celle-ci », déclare Sally Mackenzie, chercheuse principale de l’étude. « En résulte des modifications définissables de l’expression génétique qui ont un impact sur la ‘plasticité’ phénotypique d’une plante. Ce qui suggère que toutes les plantes ont cette capacité, et que l’état que nous décrivons est susceptible de jouer un rôle important dans la façon dont les plantes transmettent la mémoire de leur environnement et préconditionnent leur progéniture. »
Cette nouvelle approche n’entre pas dans le champ des OGM
L’équipe a utilisé différentes méthodes pour désactiver le gène MSH1. Dans certains cas, ils ont choisi des plantes qui possédaient déjà des mutations naturelles inactivant le gène. Dans d’autres, ils l’ont désactivé en utilisant l’interférence de l’ARN. Quelle que soit la méthode utilisée, les résultats ont été globalement similaires.
Les auteurs de l’étude affirment que l’épigénétique pourrait être un moyen important de contourner les inquiétudes concernant les organismes génétiquement modifiés (OGM) en tant qu’aliments. Bien que les cultures modifiées aient été largement reconnues comme étant sans danger pour la consommation, celles-ci restent encore aujourd’hui largement controversées.
L’épigénétique n’implique pas l’ajout de nouveaux gènes, ce qui est généralement considéré comme la partie problématique du génie génétique. Au lieu de cela, les scientifiques se contentent de contrôler l’expression des gènes. Précédemment, des chercheurs avaient affirmé que le chou et le saumon génétiquement modifiés n’étaient pas considérés comme des OGM, étant donné qu’ils cherchaient à imiter des variations génétiques naturelles plutôt que d’en créer de nouvelles. Par conséquent, cette approche s’apparenterait à l’élevage sélectif que les humains pratiquent depuis des millénaires, ce que le ministère américain de l’Agriculture semble également penser.
Les chercheurs ont précisé avoir déjà entamé des recherches de suivi, en désactivant le gène MSH1 dans des plants de tomates, de soja et de canola (étroitement apparenté au colza). Jusqu’à présent, les résultats de ces expériences ont montré une augmentation globale de leur rendement.
Par Yann Contegat, le
Source: New Atlas
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