Le peintre Raphaël, considéré comme l’un des plus grands maîtres de la peinture, est mort il y a 500 ans. Admiré du temps de son vivant, et longtemps après sa mort, il a toutefois été un peu délaissé au XIX et XXe siècle, les amateurs d’art se tournant plus vers Léonard de Vinci ou Michel-Ange. Nous pouvons essayer d’en comprendre les raisons aujourd’hui.
RAPHAËL, UN PEINTRE DE GÉNIE AU TALENT PRÉCOCE
Raphaël est natif d’Urbino, une petite ville de la région des Marches. Il a longtemps signé avec fierté “Urbinas” en hommage à ses origines, et en était d’autant plus fier qu’après Florence, Urbino était le grand épicentre d’expérimentations artistiques de la Renaissance. C’était donc un milieu très favorable à l’épanouissement d’un jeune peintre en devenir, d’autant plus qu’à Urbino travaillaient deux peintres majeurs de la Renaissance : Paolo Uccello et de Piero della Francesca, dont nous pouvons voir les splendeurs pittoresques ci-dessous.
Raphaël eut de très bons maîtres lors de sa formation ; alors qu’il baignait déjà dans un milieu favorable à la peinture, il fut ensuite l’apprenti du Pérugin, puis il travailla à Florence et enfin à Rome où il se fit connaître. Lorsqu’il vécut à Florence, il eut la chance de côtoyer Léonard de Vinci et Michel-Ange, deux autres maîtres de la peinture avec lesquels il acheva sa formation. Raphaël représente même ce cliché de l’enfant prodige, puisqu’il a “gagné” son premier contrat à l’âge de 17 ans ; c’est apparemment lors de cette même année qu’il est devenu magister, soit “propriétaire d’un atelier”.
Raphaël devient donc un maître de la peinture en 6 ou 7 ans seulement. Alors qu’il est âgé d’une vingtaine d’années seulement, le pape Jules II le charge de la décoration des salles de son palais au Vatican, et que nous appellerons plus tard « les chambres de Raphaël ». Léon X, le successeur de Jules II, lui confie ensuite le chantier de la basilique Saint-Pierre. Le talent de Raphaël nous semble d’autant plus extraordinaire qu’il était très jeune lorsqu’il fut reconnu pour la première fois comme un peintre de génie.
Sa mort prématurée à l’âge de 37 ans ne fait qu’accentuer l’ampleur de son oeuvre magistrale, qui inspira pendant de nombreux siècles la peinture occidentale après sa mort. De nombreux peintres et auteurs ont glorifié la grâce et l’harmonie présentes au sein de ses tableaux, et ont porté au sommet les qualités exceptionnelles du peintre. Delacroix affirmait que le simple nom de Raphaël lui « rappelait à l’esprit tout ce qu’il y a de plus élevé dans la peinture ». Ingres, quant à lui, vouait un véritable culte à Raphaël : nous le voyons dans son style, proche de ce dernier, mais également dans les divers hommages qu’il rendit à son œuvre au cours de sa carrière.
UN CULTE SANS CESSE RENOUVELÉ
Tous les touristes ne le savent peut-être pas, mais lorsqu’ils vont à Rome et achètent des souvenirs représentant ces fameux petits angelots, ils ne font que perpétuer l’héritage millénaire de Raphaël. Désormais, nous trouvons partout ces chérubins, qui ne sont pourtant qu’un détail du tableau La Madone Sixtine : abat-jour, bénitiers, diffuseurs de parfum, coques de téléphone portable, tapis de souris, calendriers, parapluies, magnets à coller sur le frigo, t-shirts… Tous ces goodies contribuent à faire briller l’étincelle de génie de Raphaël à travers les siècles et les décennies.
Mais ce culte de Raphaël, l’insurpassable peintre parfois qualifié de “dieu mortel” des arts, n’a pas commencé en 1980. Il était déjà mythique du temps de son vivant, et ce mythe a perduré pendant 300 après sa mort, qui a par ailleurs profondément traumatisé les Italiens de l’époque. Raphaël étant mort en 1520, nous avons fêté les 500 ans de sa mort. Et qui dit cinq-centenaire, dit pléthore d’expositions, à Rome, Paris ou Londres. Le palais ducal d’Urbino, ville natale de Raphaël, a ouvert une exposition nommée “Raphaël et ses amis d’Urbino”, avec quatre-vingts œuvres, dont une dizaine du maître.
A Urbino, la maison natale de Raphaël est devenue un musée dans lequel nous trouvons de nombreuses reliques de Raphaël, mais également des copies et des hommages d’écrivains adressés à ce mythe de la peinture. Nous pourrions presque croire que Raphaël est un dieu vénéré au sein de ce sanctuaire que représente maintenant sa maison. Ces idées sont corroborées par les propos de Luigi Bravi, le président de l’Académie Raphaël, qui considère le peintre comme une figure presque christique. Selon lui, “ce n’est pas un hasard si, selon la tradition hagiographique, Raphaël est venu au monde et s’est éteint le Vendredi saint”. Par ailleurs, il est important de noter que Raphaël est enterré au Panthéon, lieu où l’on célébrait alors “tous les dieux”.
A l’occasion des 500 ans de sa mort, la ville de Rome avait mis en place une exposition magistrale, mettant à l’honneur ce peintre mythique qu’est Raphaël. Cette exposition fut alors la plus importante jamais organisée en son honneur : elle rassembla plus de 100 oeuvres de ce maître.
Par Jeanne Gosselin, le
Source: Courrier international
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