Une mouche mutante créée avec un gène vieux de 150 millions d’années ? Cela parait improbable et digne d’un scénario de film de science-fiction mais pourtant, c’est bel et bien la conclusion de travaux de chercheurs de l’université de New York et de Chicago.

Une étude complexe

En effet, c’est dans une étude parue dans eLife le 9 octobre dernier que nous apprenons que des chercheurs sont parvenus à créer une mouche dite « mutante », rétablissant ainsi un gène vieux de 150 millions d’années. Bien loin l’idée de recréer des dinosaures et autres animaux préhistoriques, les chercheurs étudient ici les mutations amenant des changements dans l’ADN d’un embryon et de son évolution au cours du temps.

L’ADN est une molécule aussi intéressante que complexe. Pour rappel, il s’agit d’une longue molécule en forme de double hélice composée d’une succession précise de nucléotides accrochées les uns aux autres par des liaisons phosphodiester. C’est cette molécule qui est responsable de notre information génétique. Sa structure lui permet de se dupliquer en deux molécules identiques entre elles et identiques à la molécule mère lors du phénomène de réplication qui a lieu avant la division cellulaire.

Ainsi, l’information génétique n’est jamais perdue et, grâce aux cellules germinales, peut se transmettre. Stephan Small, biologiste de l’université de New York, rapporte que l' »on sait depuis plusieurs années que ce sont les changements de certaines séquences ADN qui sont responsables de l’évolution au sein des espèces ainsi que de la séparation entre deux espèces distinctes, mais la cause de ces changements reste encore un mystère ».

Aujourd’hui, de nombreux travaux portent sur la compréhension de notre évolution au travers de notre code génétique, mais la tâche s’avère compliquée tant les méthodes restent imparfaites et le risque de ne pas avoir les résultats espérés sont élevés. Des effets secondaires peuvent s’imbriquer, changer la structure à un endroit précis peut en impacter une autre et donc donner une nouvelle déclinaison.

ADN en double hélices
© pixabay / qimono

Partir de zéro

Partir du commencement ou « evo-devo », c’est la méthode utilisée par les chercheurs qui ont d’abord cherché à recréer le gène original d’un gène présent dans l’ADN moderne d’une mouche appelée « mouche du vinaigre ». Pour cela, ils ont décliné plusieurs versions du code génétique de la mouche après avoir inféré des séquences de gène vieux de 150 millions d’années. Ils se sont ensuite servis d’une protéine spécifique, la Bicoid (responsable de la régulation de la formation des structures au niveau de la partie antérieure de l’animal), d’abord par simulation informatique qu’ils ont par la suite recréé en laboratoire avant de les implémenter dans des embryons. Partant de là, les chercheurs ont ensuite observé les changements génétiques entre la mouche d’aujourd’hui et son ancêtre, il y a plus de 150 millions d’années, afin de déterminer quels changements ont permis son évolution actuelle. Cette méthode a permis aux chercheurs de voir que deux protéines spécifiques ont joué un rôle majeur dans l’évolution génétique, plus particulièrement au niveau de la tête de la mouche.

Cette réussite laisse de bons espoirs aux biologistes dans la compréhension du code génétique et de son ADN. L’équipe derrière ces travaux espère arriver à une compréhension complète de chaque mutation ayant conduit à la mouche moderne avant de se projeter sur d’autres espèces vivantes.

Une mouche du vinaigre espèce utilisée dans le cadre du travail sur l’évolution de l’ADN
© wikipedia / André Karwath
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