Dans le cadre d’une affaire judiciaire alléguant que l’entreprise n’avait pas correctement évalué les risques d’une exposition constante à des contenus violents pour la santé mentale, Facebook a annoncé qu’il allait dégager la somme de 52 millions de dollars afin d’indemniser les modérateurs œuvrant sur sa plateforme.

Des modérateurs exposés à toutes les horreurs « qu’un esprit dépravé peut imaginer ou commettre »

Dévoilé ce mardi, l’accord verra l’entreprise de Mark Zuckerberg verser un minimum de 1 000 dollars à chaque modérateur de contenu, avec la possibilité d’une compensation financière supplémentaire (jusqu’à 50 000 dollars) si ces derniers souffrent de troubles psychiques, incluant le syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Les modérateurs, qui sont généralement employés par des entreprises tierces, sont constamment exposés à un flot de contenus violents, incluant abus sexuels sur des enfants, décapitations, actes terroristes, cruauté envers les animaux ainsi que « toute autre horreur qu’un esprit dépravé peut imaginer ou commettre », estime Steve Williams, l’un des avocats des plaignants.

Selon Williams, l’issue du procès constitue une victoire rare contre le géant des réseaux sociaux : « Le préjudice subi est réel et obtenir gain de cause constitue un véritable soulagement. » En plus des dommages et intérêts versés, Facebook s’est également engagé à modifier un certain nombre de ses politiques internes afin de mieux prendre en compte les conséquences de ce type de travail sur la santé mentale. Au total, ce sont plus de 11 000 personnes, ayant travaillé comme modérateurs de contenu sur la plateforme depuis 2015 et vivant en Californie, en Arizona, au Texas et en Floride, qui pourront bénéficier d’une indemnisation dans le cadre de l’accord.

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« Les perspectives d’avenir sont tout aussi importantes que les compensations financières »

En septembre 2018, Selena Scola, ancienne modératrice de la plateforme, avait attiré l’attention des médias sur les conditions de travail difficiles des modérateurs de contenu en portant l’affaire devant un tribunal de l’État de Californie. À la suite de cette action en justice, elle avait été rejointe par plusieurs autres anciens employés, et plusieurs rapports avaient fait état des graves conséquences de la modération de contenu sur la santé mentale des travailleurs. Si, comme Scola, plusieurs modérateurs souffraient de stress post-traumatique après quelques mois d’exercice seulement, d’autres avaient déclaré être devenus dépendants aux contenus violents.

En 2019, un rapport de The Verge avait quant à lui révélé que les modérateurs de contenu étaient en moyenne payés 28 800 dollars par an pour regarder quotidiennement des milliers de vidéos horribles avec très peu de soutien psychologique. Selon un porte-parole de Facebook, ce nouvel accord représente une partie des changements actuellement opérés concernant la politique de la firme vis-à-vis du métier de modérateur : « Nous sommes reconnaissants envers les personnes faisant ce travail important et contribuant à faire de Facebook un environnement plus sûr. À l’avenir, nous nous engageons à leur fournir un soutien supplémentaire par le biais de cet accord. »

Parmi les améliorations relatives aux conditions de travail des modérateurs de contenu, Facebook a indiqué qu’il allait opérer une refonte des outils d’examen afin de rendre leur travail plus sûr et qu’il exigerait des entreprises sous-traitantes qu’elles proposent à leurs employés des séances de thérapie de groupe mensuelles. « Lorsque cette affaire a débuté, il s’agissait seulement de faire évoluer les politiques. C’est donc une victoire que celle-ci soit élargie. Les perspectives d’avenir sont tout aussi importantes que les compensations financières », conclut Steve Williams.

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