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Des scientifiques proposent une nouvelle méthode pour cartographier la matière noire

Cette approche permet de mesurer directement la densité locale de la matière noire en observant son influence gravitationnelle

Matiere Noire
Image d’illustration — © Elmi1966 / Wikimedia Commons

La matière noire, souvent qualifiée de composant le plus énigmatique de l’Univers, est présente en bien plus grande quantité que la matière ordinaire, mais demeure insaisissable. Des scientifiques viennent de mettre au point une méthode pour cartographier sa distribution dans notre galaxie, la Voie lactée, en analysant son influence gravitationnelle sur les étoiles à neutrons en rotation rapide, appelées pulsars. Les résultats de cette recherche sont disponibles sur la plateforme de prépublication arXiv.

Une substance plus rare que l’or

Jusqu’à présent, les chercheurs utilisaient les pulsars binaires, des paires de pulsars en orbite l’un autour de l’autre, pour sonder la matière noire. Cependant, une équipe dirigée par Sukanya Chakrabarti de l’université d’Alabama à Huntsville a réussi à inclure les pulsars solitaires dans ses observations, doublant ainsi le nombre de sources utilisables pour mesurer les variations gravitationnelles. Cette avancée permet pour la première fois d’obtenir une estimation directe de la densité locale de la matière noire.

Les résultats des chercheurs révèlent que la quantité de matière noire présente dans un volume équivalent à celui de la Terre est inférieure à un kilogramme. En comparaison, des millions de kilogrammes d’or sont extraits chaque année sur notre planète, ce qui rend la matière noire bien plus précieuse que le métal précieux, si l’on s’en tient à sa rareté.

Cette rareté apparente est due à la nature diffuse de la matière noire. Contrairement à la matière ordinaire qui se regroupe en étoiles et planètes, la matière noire s’étend dans un halo qui entoure les galaxies. Bien qu’invisible, sa présence empêche les galaxies de se disloquer sous l’effet de leur rotation. Sans elle, la force gravitationnelle de la matière visible ne suffirait pas à maintenir la cohésion des galaxies.

Une galaxie en oscillation

Dans des études précédentes, Chakrabarti a utilisé des simulations pour modéliser l’interaction gravitationnelle entre la Voie lactée et ses galaxies satellites. Ces travaux montrent que les étoiles de la Voie lactée ressentent des forces gravitationnelles différentes selon leur position par rapport au disque galactique.

L’équipe de chercheurs a également mis en évidence l’influence des galaxies satellites de la Voie lactée, notamment le Grand Nuage de Magellan (LMC), qui provoquent une oscillation dans notre galaxie. Cette oscillation génère une asymétrie gravitationnelle mesurable à l’aide des pulsars. En analysant les variations de leur accélération, les scientifiques ont pu déterminer l’effet de la matière noire sur notre galaxie et mieux cerner sa répartition.

Ce phénomène a été comparé à un enfant qui apprend à marcher, oscillant de manière irrégulière. La Voie lactée connaît une dynamique semblable sous l’effet de la gravitation de ses galaxies satellites, influençant les variations des pulsars.

Les pulsars, des phares cosmiques

Les pulsars sont des vestiges d’étoiles massives ayant explosé en supernova. Leur cœur dense et compact, mesurant environ 20 kilomètres de diamètre, est composé de la matière la plus dense connue dans l’Univers. Une simple cuillère à café de cette matière pèserait environ 10 millions de tonnes. Leur rotation extrêmement rapide, jusqu’à 700 tours par seconde, en fait des balises précises pour mesurer les variations gravitationnelles. Leur champ magnétique intense émet des faisceaux d’énergie sous forme de vent stellaire, créant une sorte de friction qui ralentit progressivement leur rotation.

Cette rotation qui ralentit avec le temps est un phénomène connu sous le nom de « freinage magnétique ». Ce processus rendait auparavant difficile l’utilisation des pulsars solitaires pour les calculs gravitationnels. Mais grâce à une nouvelle technique, l’équipe a pu compenser cet effet et intégrer les pulsars solitaires dans leurs analyses.

L’équipe de Chakrabarti a développé une nouvelle méthode permettant de mesurer ce ralentissement avec précision et d’en déduire l’effet gravitationnel de la matière noire. Grâce à cette approche, il est désormais possible de détecter des accélérations infimes de l’ordre de 10 centimètres par seconde chaque décennie, une vitesse comparable à celle d’un bébé à quatre pattes. Pour aller plus loin, le détecteur de matière noire le plus sensible au monde a livré ses premiers résultats.

Par Eric Rafidiarimanana, le

Source: Space

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