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Les deux faces de la Lune ne viennent pas du même monde : Chang’e 6 révèle un secret vieux de 3 milliards d’années

Et si notre Lune n’était pas aussi homogène qu’on le pensait ? La mission Chang’e 6 vient de prouver que ses deux faces ont vécu des histoires différentes. Ce qu’on croyait être un seul monde cache une dualité cosmique, sculptée par la chaleur et le temps. Et plus on explore, plus cette différence se révèle fascinante.

Lune Face Cachee
© Apollo 16 Crew, NASA

Chang’e 6 : une mission historique sur la face cachée de la Lune

En juin 2024, la mission Chang’e 6 a accompli un exploit inédit : ramener sur Terre des échantillons de la face cachée de la Lune. Ces fragments viennent du bassin Pôle Sud-Aitken, un cratère d’impact vieux de plus de 4 milliards d’années. C’est l’un des plus vastes du système solaire. Cette région, longtemps inexplorée, offre une fenêtre unique sur les profondeurs lunaires. Autrement dit, un véritable voyage au cœur de l’histoire du satellite.

Les chercheurs chinois ont ensuite comparé ces échantillons à ceux rapportés par les missions Apollo. Ils ont découvert que les roches de Chang’e 6 se sont formées à des températures environ 100 °C plus basses. Cet écart prouve que l’intérieur de la Lune n’est pas homogène. En d’autres termes, ses deux hémisphères ont évolué dans des environnements thermiques très différents.

Des roches plus froides, une Lune à deux vitesses thermiques

Pour aller plus loin, les scientifiques ont utilisé des modèles informatiques et des analyses isotopiques afin de retracer l’histoire des roches. Ils ont daté les échantillons à 2,8 milliards d’années. À cette époque, la Lune montrait déjà deux visages : l’un chaud et volcanique, l’autre froid et calme. Ces résultats démontrent que ses mécanismes internes ont fonctionné de manière inégale.

La face visible, tournée vers la Terre, contient plus d’éléments producteurs de chaleur comme l’uranium, le thoriumet le potassium, regroupés sous le nom de KREEP. Ces éléments dégagent de la chaleur par désintégration radioactive, maintenant une activité volcanique intense. En revanche, la face cachée, plus pauvre en KREEP, est restée froide, épaisse et marquée de cratères, figée dans le temps. Une opposition qui en dit long sur l’évolution thermique du satellite.

Pourquoi la Lune est-elle asymétrique ? Les hypothèses se multiplient

Mais alors, comment cette différence est-elle née ? Plusieurs scénarios tentent de répondre à cette question. Certains chercheurs évoquent un impact colossal dans la jeunesse de la Lune. Ce choc aurait redistribué la matière interne, concentrant la chaleur et les éléments radioactifs d’un seul côté. Ce déséquilibre thermique pourrait avoir duré plusieurs milliards d’années, façonnant durablement la structure interne.

D’autres imaginent la fusion d’un petit satellite compagnon, absorbé de manière inégale. Une autre théorie pointe la gravité terrestre, qui aurait agi comme un chauffage gravitationnel sur la face visible. Ce processus aurait ralenti son refroidissement, prolongeant son activité volcanique. Quelle qu’en soit la cause, ce contraste explique les différences visibles depuis la Terre : mers sombres d’un côté, cratères infinis de l’autre. Autrement dit, une Lune double, à la fois sœur et étrangère à elle-même.

Ce que Chang’e 6 change pour notre compréhension du système solaire

En fin de compte, les résultats publiés dans Nature Geoscience bouleversent notre vision de la Lune. On pensait son intérieur uniforme ; on découvre une dualité profonde, héritée de son histoire primitive. Cette asymétrie pourrait aussi aider à comprendre la formation des planètes rocheuses, comme la Terre ou Mars. En observant la Lune, on observe un miroir miniature de l’évolution planétaire.

Grâce à Chang’e 6, les scientifiques disposent d’échantillons venus d’un monde encore inconnu. Cette mission marque une étape clé vers une exploration plus complète du système solaire. Désormais, les futures sondes lunaires pourraient analyser les couches profondes du manteau, rechercher des traces d’eau, ou tester de nouvelles technologies d’exploration humaine. Bref, chaque fragment ramené ouvre une nouvelle page du grand livre lunaire.

Par Eric Rafidiarimanana, le

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