Longtemps, Marvel et DC Comics ont régné en maître sur l’univers des super-héros, créant à tour de bras quelques-unes des plus grandes figures de la culture populaire. Avec le temps, leurs lecteurs sont devenus adultes, artistes, réalisateurs, scénaristes et coloristes avant de créer, à leur tour, leur propre héros. C’est le cas de Robert Kirkman, ce geek américain qui, après avoir vendu les comics des plus grands derrière le comptoir d’un comic shop, s’est lancé dans l’aventure en créant The Walking Dead, Marvel Zombies et Invincible.
Invincible, c’est de la violence mais aussi des questions pointues et profondes que l’on découvre à la lecture du résumé du comics. L’histoire est celle de Mark Grayson, un jeune homme adolescent d’apparence normale, mis face à toutes les contradictions de son âge. Son problème, c’est son héritage : fils de l’homme le plus puissant de tous les temps, il semble avoir hérité de ses pouvoirs, pour son plus grand plaisir. Assistant depuis son plus jeune âge aux exploits de son ainé, Omni-Man, il rêvait lui aussi à ces capacités extraordinaires, à la beauté et la vie épique du héros. C’est donc heureux qu’il apprend la réalité de sa situation à l’âge de 7 ans : fils d’un homme issu de la race extraterrestre des Viltrumites et d’une romancière, il est l’héritier d’une culture dont il ne sait rien, ou presque.
Ce n’est qu’à 17 ans qu’il prend possession de ses nouvelles capacités mais avant même d’apprendre à les gérer, il est confronté à une situation nouvelle pour le moins bouleversante : Les Gardiens du Globe, un groupe de héros admirés par tous sont sauvagement assassinés. Pour Mark, c’est le début des ennuis, des combats, des trahisons et manipulations mais aussi et surtout, le début de l’âge adulte.
Très vite, c’est toute la vie de l’adolescent qui tourne au film d’action : il rejoint un groupe de jeunes super-héros nommé Teen Team et composé de Robot, Dupli-Kate, Rex-Splode et Atom Eve. Robot, le leader de l’équipe, est en réalité un robot drone contrôlé à distance par un humain malformé. Dupli-Kate, comme son nom l’indique, peut créer une armée à partir de son propre corps grâce à sa capacité extraordinaire de se dupliquer. Enfin, Atom-Eve est l’un des personnages centraux de cette histoire : créée par le gouvernement suite à des tests pour recréer des super-héros, elle est capable de manipuler la matière. Allant dans la même école que le héros, elle commencera une romance avec l’Invincible et l’aidera dans chacune des ses aventures.
Contrairement aux habituelles histoires de super-héros, le lecteur d’Invincible n’est pas omniscient et ne connait presque rien de son héros. De fait, la plupart des personnages gardent une énorme part de mystère puisque seuls leurs identités publiques, leurs masques et leurs capes sont révélés au lecteur qui ne connaît rien de leurs vies privées. Seule celle de Mark est mise en avant, permettant de se concentrer sur les différentes conséquences et répercussions de sa carrière de héros sur sa vie privée. Un bon point pour les lecteurs qui préfèrent ne pas s’embêter de détails au profit d’une histoire claire, simple et de fait, mieux développée.
Présentée dans un premier temps comme une parodie des habituels justiciers et de leurs aventures, Invincible s’inspire des jeunes héros des grandes maisons d’édition : les fans de Spider-Man trouveront quelque chose à la Peter Parker dans le personnage de Mark. On retrouve des environnements communs aux comics destinés aux plus jeunes : le héros va au lycée et tente de découvrir qui il est au moment où il prend possession de ses pouvoirs, une période perturbante alors que le jeune homme est en pleine construction. Les autres super-héros sont ouvertement inspirés des grandes figures de la culture geek : les Gardiens du Globe sont, au départ, une pâle copie des membres de la Justice League mais deviennent, avec le temps, des protagonistes intéressants tant ils sont développés indépendamment des héros DC.
Comme expliqué plus haut, Kirkman est un geek et ne s’en cache pas, ce qui offre une lecture plaisante pour un public né dans les années 80 et 90 : ici les héros parodiés sont plus un hommage qu’une vulgaire caricature et les combats comportent de nombreux éléments faisant penser à Dragon Ball Z. Les effets sont jouissifs et dans son univers semblant enfantin et coloré, Mark est confronté à la violence des combats et les scènes gores se multiplient à mesure que le récit se développe. Un choc pour le lecteur qui participe grandement au plaisir de lecture. Fan avant tout, Kirkman se fait plaisir sur les crossovers et références et si certains y voient du simple fan service, d’autre saluent tout simplement les connaissances de l’auteur.
Si, comme nous, vous êtes charmé par le principe, sachez que vous pouvez trouver ces comics en France puisqu’ils y sont publiés par Delcourt. Plus que le simple plaisir de découvrir l’histoire, les comics plaisent aussi par leurs dessins. Des traits que l’on doit à Cory Walker (qui a travaillé sur la série Shadowpact de DC Comics) puis à Ryan Ottley à partir du 8e tome.
Invincible, c’est un comics jeune, frais et fascinant créé par l’un des plus grands génies du genre de ces dernières années. Entre hommages et détournements se cache une histoire magnifiquement bien développée avec des personnages attachants et intéressants. Mark Grayson a de beaux jours devant lui dans la peau de ce super-héros moderne et sous le crayon d’artistes de talent. Une série de comics à ajouter à votre liste de lecture, sans quoi vous risquez de passer à côté d’une œuvre surprenante qui s’apprête à devenir magistrale.