Et si comprendre le monde devenait (enfin) accessible, drôle et visuel ?
C’est le pari réussi de La Guerre des voisins, une bande dessinée aussi percutante qu’intelligente signée par un professeur-dessinateur passionné. En transposant les enjeux géopolitiques dans un simple immeuble, l’auteur nous offre une lecture éclairante et pédagogique des tensions qui secouent notre planète. ONU, conflits armés, dépendances énergétiques, inégalités économiques… tout y passe, à hauteur d’humain.

Chez Daily Geek Show, on a eu un véritable coup de cœur pour cet album qui mêle humour, vulgarisation intelligente et engagement discret. Une lecture qui donne à réfléchir, sans jamais être moralisatrice, et qui peut aussi bien parler aux ados curieux qu’aux adultes désorientés par l’actualité. Bref, une BD à glisser entre toutes les mains. On a rencontré son auteur pour en parler.
Bonjour Matias, Mikko ? tu peux te présenter
Eh bien moi c’est Mikko, professeur de lettres et de philo dans un lycée à Paris, et auteur de BD! Je viens de sortir “La Guerre des voisins” chez Dargaud, une BD qui traite de géopolitique de manière ludique. J’ai collaboré avec un certain “Prof Péron” qui apparaît régulièrement dans la BD, tel Jamy dans son camion, pour approfondir certains points que la BD aborde.

Peux-tu nous raconter comment est né le projet La Guerre des voisins ? Quel a été le déclic pour représenter la géopolitique à travers un immeuble ?
Je suis prof dans un lycée, et tout est parti d’une surveillance de DST pendant laquelle je griffonnais sur des feuilles de brouillon. La Russie venait de lancer son “opération spéciale”, on ne parlait que de ça, du coup je me suis mis, sans trop réfléchir, à dessiner Poutine. Très vite, il est apparu dans la peau d’un gars qui voulait s’emparer de l’appart de son voisin (Zelensky en l’occurrence, avec son fameux tee-shirt vert). En tirant sur ce fil, la métaphore de l’immeuble s’est très vite mise en place.
Pourquoi ce choix du format BD pour traiter un sujet aussi sérieux que la géopolitique ? Qu’est-ce que le dessin permet que d’autres formats n’offrent pas ?
Il me semble justement que le format BD permet de rendre accessibles, de rendre visuelles, des problématiques parfois complexes à appréhender. Et la métaphore de l’immeuble m’a été très utile dans ce sens !
L’analogie de l’immeuble est à la fois simple et puissante. Qu’est-ce qu’elle t’a permis de montrer que des cartes ou des chiffres n’auraient pas réussi à faire passer ?
Disons qu’elle permet de ramener les grands défis que rencontre notre monde à des problématiques concrètes. Le syndic dépassé pour évoquer l’ONU qui peine à se faire entendre, la chaudière en surchauffe pour le réchauffement climatique, les embrouilles entre voisins pour les guerres…
La BD traite de sujets parfois très complexes (conflits, inégalités, dépendances économiques). Comment as-tu réussi à garder un ton accessible, presque ludique, sans jamais tomber dans la caricature ?
Le côté ludique, c’est parce que je pense sincèrement qu’on apprend mieux en s’amusant. Et puis quand on regarde ce qui se passe dans le monde en ce moment, je trouve qu’on a parfois vraiment l’impression que le monde est dirigé par des enfants. Quand on prend un peu de recul, les guerres ressemblent pas mal à des querelles de gamins sur une cour d’école, non ?
À quel public recommandes-tu cette BD ? Est-ce qu’un ado de 15 ans peut autant y trouver son compte qu’un adulte curieux ou qu’un prof d’histoire-géo ?
Oui, bien sûr ! À partir de 12 ans et en étant un peu curieux de comprendre le monde dans lequel on évolue, cette BD est faite pour vous !
On sent un vrai travail de documentation derrière chaque page. Comment t’es-tu préparé pour construire ce monde cohérent sans déformer les faits ?
Je travaille depuis 3 ans pour la page Instagram de “Matin_queljournal !” pour laquelle je publie régulièrement des strips mettant en scène la “Guerre des voisins”, donc je suis assez rodé : le monde des Voisins existait déjà avant la version papier. Mais disons que la sortie BD m’a amené à approfondir pas mal de points. C’est pour cela que j’ai collaboré avec le “Prof PERON”, un “vrai” prof d’Histoire-géographie qui intervient régulièrement comme personnage dans la BD et avec lequel j’ai eu beaucoup de réunions de travail.

Quel est le personnage ou la planche dont tu es le plus fier dans cet album ? Pourquoi ?
J’aime bien la couverture, elle a été très plaisante à réaliser. Je l’ai vraiment gardée pour la fin en plus, donc c’était un moment agréable, presque de détente, après plusieurs mois de travail acharné !
Tu parviens à mêler humour et pédagogie dans un sujet pas toujours drôle. Est-ce que tu considères La Guerre des voisins comme une forme d’engagement ?
J’essaie d’être le plus neutre possible. Pour moi l’idée c’est avant tout de livrer un état des lieux et que chacun se fasse son idée. Si engagement il y a, c’est celui de pousser le lecteur à se renseigner, à lire, à aller plus loin que le robinet d’info en continu. Si on veut bien comprendre le conflit Russie-Ukraine par exemple, il me semble important de savoir ce que sont les accords de Minsk.
Tu as commencé ce travail via Instagram avec la revue Mâtin !. Quel regard portes-tu sur le passage au format livre ? Y a-t-il eu des surprises ou des réinventions nécessaires ?
Le format livre impose un rythme différent. Pour Instagram, la mécanique était huilée, 9 cases et une chute. Là je propose autre chose, c’est plus fouillé, plus pédagogique. Mais il y a toujours un ton léger et de la vanne.
Enfin, si on devait convaincre quelqu’un d’acheter cette BD en une phrase… Que lui dirais-tu ?
Tu veux décrypter le monde dans lequel tu vis en t’amusant ? Fonce à la librairie, y’a La Guerre des Voisins qui t’attend !
Par Antoine - Daily Geek Show, le
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