
Alors qu’on estimait jusqu’à présent qu’Homo habilis avait été le premier à déjouer les grands prédateurs africains, la réanalyse de fossiles vieux de près de 2 millions d’années indique un scénario bien différent.
Des témoignages de prédation active
Considérée comme la première espèce véritablement humaine, H. habilis aurait créé les premiers outils en pierre (dits oldowayens) dans le nord de la Tanzanie. Dans cette même région, des chercheurs ont trouvé des preuves précoces de dépeçage de carcasses d’animaux ciblés par les grands félins préhistoriques, laissant penser que ces lointains membres de notre lignée ont été les premiers à « prendre le dessus » sur ces redoutables prédateurs, connus pour croquer des hominidés antérieurs tels que Paranthropus et les australopithèques.
Récemment, les chercheurs ont réanalysé les restes de deux H. habilis vieux de 1,85 million d’années provenant de la gorge tanzanienne d’Olduvai et présentant des signes clairs de rongeage par des carnivores.
Si ces marques avaient initialement été attribuées à des hyènes, qui auraient charogné leurs dépouilles, grâce à l’intelligence artificielle, l’équipe a pu établir de façon convaincante qu’il s’agissait en fait de l’oeuvre de léopards, et donc de témoignages de prédation active.

Pyramide trophique
Probablement représentatifs des populations d’H. habilis qui vivaient à Olduvai, ces cas indiquent l’incapacité de ce taxon à faire face aux risques de prédation d’un carnivore de taille moyenne. « Les implications sont majeures, car cela montre que H. habilis était encore davantage une proie qu’un prédateur », soulignent les chercheurs.
Selon Manuel Domínguez-Rodrigo, auteur principal de la nouvelle étude, publiée dans les Annals of the New York Academy of Sciences, Homo habilis était jusqu’à présent considéré comme le premier conquérant de la pyramide trophique, un chasseur-charognard repoussant les carnivores loin de leurs proies. « Mais il s’avère que ces individus étaient dévorés par les léopards, tout comme les australopithèques qui les avaient précédés », explique-t-il.
Sur la base des preuves fossiles dont nous disposons, ce « titre honorifique » reviendrait à Homo erectus, qui semblait mieux outillé qu’H. habilis pour déjouer ces menaces.
Plus tôt ce mois-ci, une étude avait révélé que nos ancêtres massacraient déjà des éléphants il y a 1,78 million d’années.