Elle était plus connue pour sa beauté et sa réputation (sulfureuse) que pour son esprit. Et pourtant, Hedy Lamarr a révolutionné nos vies. Inventeuse de génie, l’actrice a mis au point le principe scientifique utilisé aujourd’hui dans le Wi-Fi et le Bluetooth. Retour sur la vie de cette femme au destin aussi exceptionnel que tragique.
Une actrice pionnière
Hedy Lamarr, de son vrai nom Hedwig Eva Maria Kiesler, est née à Vienne en 1914, d’une mère roumaine et d’un père ukrainien. Très jeune, elle se découvre une passion pour le cinéma et, à 16 ans, se rend dans les studios de Vienne, pour devenir actrice. En 1931, elle part à Berlin, où le cinéma vit un véritable âge d’or. Alors qu’elle n’a que 18 ans, en 1933, elle accède à la notoriété en jouant dans Extase, du réalisateur tchécoslovaque Gustav Machaty. Dans ce film qui fait scandale, elle apparait entièrement nue et est la première actrice à simuler un orgasme sur grand écran.
Le pape Pie XII condamnera le film, qui est interdit en Allemagne et aux États-Unis (avant d’être de nouveau autorisé en 1937), mais l’actrice accède ainsi à la notoriété. Elle épouse Fritz Mandl, un marchand d’armes autrichien, fournisseur de Mussolini, qui fréquente également Hitler et l’empêche de poursuivre sa carrière.
Elle part à Hollywood, où elle change son nom et devient Hedy Lamarr. Elle se reprochera par la suite de ne pas avoir su faire preuve de discernement dans le choix de ses films, car aucun n’est resté dans les mémoires. Ce sont surtout ses aventures et ses histoires d’amour qui la font connaître, ainsi que son statut de sex-symbol. Parmi ses amants, on compte John F. Kennedy, Marlon Brando, Charlie Chaplin…
Une inventeuse d’exception
Mais Hedy Lamarr était également un esprit brillant et passionnée d’inventions. L’historienne et écrivaine Vivianne Perret raconte, dans Une vie, une oeuvre, que l’actrice avait installé un atelier à son arrivée à New York. « Dans tous les endroits où elle a vécu elle installait un atelier. Elle, sa détente c’était d’inventer. Elle inventait tout et n’importe quoi : un bouillon cube qui lorsqu’il se dissolvait devenait un soda, un collier fluorescent pour chien, un système pour aider les handicapés à sortir de leur bain… Elle était sans arrêt à l’affût d’informations, à les transformer en inventions. »
Lors d’une soirée, elle rencontre le pianiste George Antheil. Ils discutent tous les deux d’armement, un sujet qu’elle maîtrise bien, de par son ancien mariage. On est alors en 1941, soit en pleine Seconde Guerre mondiale. Leur idée est de créer un système de cryptage des communications qui serait applicable aux torpilles qui, à l’époque, étaient très souvent détournées par les armées ennemies. Ils mettent au point un système appelé étalement de spectre par évasion de fréquence ou FHSS en anglais, basé sur un émetteur-récepteur permettant à la torpille de changer de transmission afin de ne pas être détectée.
Une invention visionnaire, puisqu’elle est toujours utilisée, aujourd’hui, dans nos GPS, nos téléphones portables ou le Bluetooth. Les deux créateurs déposent un brevet le 10 juin 1941. L’armée américaine juge à l’époque l’idée saugrenue, toutefois le brevet est classé top secret pendant 17 ans, et encourage l’actrice à utiliser son image pour réaliser des fonds au service de la guerre. Ce système est pourtant utilisé en 1962, lors de l’épisode de la crise des missiles de Cuba, où son nom n’apparaît pas.
Une fin de vie difficile
Hedy Lamarr finit sa vie dans un relatif anonymat et dans la pauvreté, après avoir dilapidé sa fortune. Elle est même arrêtée pour vol à l’étalage. Elle a connu un seul grand succès au cinéma, avec Samson et Dalila, mais quitte définitivement les écrans en 1957, et elle se mariera six fois.
Il faut attendre 1997 pour qu’elle soit reconnue pour ses talents d’inventeuse et reçoive le prix de l’Electronic Frontier Foundation. Elle meurt le 19 janvier 2000, à 85 ans. En 2014, elle est inscrite à titre posthume au National Inventors Hall of Fame.
Bill Gates devrait lui faire élever une statue