Si un effondrement démographique majeur sur l’île de Pâques, dû à la surexploitation des ressources naturelles et antérieur à l’arrivée des Européens, était depuis longtemps supposé, de nouvelles recherches renforcent l’idée d’une population autochtone réduite et stable, ayant vécu de manière durable pendant des siècles.
Une théorie populaire
Située dans l’océan Pacifique, à un peu plus de 3 500 kilomètres de la côte ouest du Chili, Rapa Nui, en langue locale, est principalement réputée pour ses moai : des sculptures monolithiques reconnaissables à leur tête massive. L’île volcanique aurait commencé à être occupée par des groupes polynésiens autour de 1200 de notre ère.
D’après un ouvrage populaire de l’historien américain Jared Diamond, les 164 kilomètres carrés de Pâques étaient alors en grande partie couverts de forêts de palmiers. Celles-ci auraient rapidement disparu en raison d’une croissance démographique galopante et d’une utilisation non durable des ressources, conduisant à un effondrement généralisé de sa population (ou « écocide ») avant l’arrivée des Hollandais sur l’île, en 1722.
On estime que la population autochtone subvenait principalement à ses besoins grâce aux manavai, qui étaient de petits jardins vivriers clos par des pierres verticales, permettant de retenir l’humidité et de fournir de précieux nutriments aux cultures. Des études antérieures avaient suggéré que de telles structures couvraient entre 5 et 21 kilomètres carrés de l’île, soit une surface suffisante pour soutenir une population d’au moins 16 000 personnes.
Récemment, Carl Lipo, de l’université de Binghamton, et ses collègues ont procédé à de nouvelles estimations. En s’appuyant sur l’imagerie satellite et des modèles d’apprentissage automatique formés à partir de relevés de terrain, ils sont parvenus à la conclusion que la surface totale des manavai n’aurait pas dépassé 0,76 kilomètre carré. Ce qui se serait révélé suffisant pour faire vivre 4 000 individus, correspondant à la population insulaire au début du XVIIIe siècle.
Une population insulaire réduite et stable pendant des centaines d’années
Selon l’équipe, dont les travaux sont publiés dans la revue Science Advances, ces résultats suggèrent que la population est restée remarquablement stable durant des centaines d’années.
« Ils appuient l’hypothèse postulant que l’île n’a jamais abrité de population massive surconsommant ses ressources », souligne Lipo. « Il n’existe à ce jour pas de preuves archéologiques concrètes d’un effondrement démographique antérieur à l’arrivée des Européens. »
« L’idée que les insulaires aient transformé leur environnement de manière à pouvoir vivre durablement pendant des générations prend de plus en plus d’ampleur », poursuit-il. « Des populations peu nombreuses et des établissements humains dispersés et de faible densité ont probablement permis aux communautés de produire de la nourriture en quantité suffisante pendant plus de 500 ans. »
Par Yann Contegat, le
Source: New Scientist
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