Dans l’Angleterre médiévale, 1110 s’est révélée être une année désastreuse. Des pluies torrentielles ont endommagé les récoltes, laissant derrière elles une terre en proie à la famine et pour ne rien arranger, une nuit de mai, la Lune s’est volatilisée.

Une bien étrange disparition

Dans le cadre de recherches publiées dans la revue Nature Scientific Reports, des chercheurs de l’université de Genève suggèrent qu’une combinaison de cendres volcaniques et de souffre ainsi qu’un temps plus froid auraient été à l’origine de ce mystérieux phénomène.

Décrite dans la Chronique de Peterborough, manuscrit anglo-saxon, cette disparition n’était pas en lien avec la couverture nuageuse, puisqu’il y est précisé que la nuit était claire et que les étoiles étaient restées visibles et scintillantes lorsque notre satellite naturel s’était évanoui. « La cinquième nuit du mois de mai, la Lune apparut, brillante le soir, et par la suite, sa lumière diminua progressivement. Dès que la nuit arriva, elle s’éteignit si complètement qu’on ne vit plus ni lumière, ni orbe, ni quoi que ce soit d’autre. Cela continua presque jusqu’au jour, où elle réapparut pleine et brillante. »

En analysant des carottes glaciaires, les scientifiques avaient précédemment déterminé qu’un énorme bouleversement s’était produit dans l’atmosphère terrestre il y a environ un millénaire, après qu’un nuage massif de particules riches en soufre a traversé la stratosphère avant de retomber sur Terre, entraînant un assombrissement marqué du ciel. S’il avait été confirmé que la disparition de la Lune avait bien eu lieu, différentes théories étaient jusqu’à présent avancées pour tenter d’en expliquer les raisons.

Certains supposaient que le dépôt sulfureux avait été laissé par une éruption majeure du volcan islandais Hekla en 1104. Cependant, une analyse plus récente, basée sur l’échelle de temps connue sous le nom de « Greenland Ice Core Chronology 2005 » (GICC05), avait mis en évidence des dates erronées pour certains des événements.

— solarseven / Shutterstock.com

L’éruption d’un volcan japonais en 1108 vraisemblablement à l’origine du phénomène décrit

S’appuyant sur cette dernière, les chercheurs suisses ont déduit que cette éruption ne pouvait avoir entraîné ce phénomène spécifique, et ont par la suite examiné des documents médiévaux décrivant des éclipses lunaires susceptibles de correspondre à l’évènement observé en 1110.

« Les spectaculaires phénomènes optiques atmosphériques associés aux aérosols volcaniques de haute altitude ont attiré l’attention des chroniqueurs depuis l’Antiquité », précisent les auteurs de l’étude. « Et il se trouve que la luminosité signalée des éclipses lunaires peut être utilisée à la fois pour détecter les aérosols volcaniques dans la stratosphère et pour quantifier les profondeurs optiques stratosphériques à la suite d’éruptions massives. »

En poursuivant ses recherches, l’équipe a découvert qu’une autre éruption volcanique majeure s’était produite au Japon en 1108. En combinant témoignages écrits, observation de cernes d’arbres et d’autres documents historiques, les scientifiques ont conclu que l’évènement du mont Asama était vraisemblablement à l’origine de la disparition de la Lune, survenue deux ans plus tard.

Selon les auteurs de l’étude, ces travaux mettent une nouvelle fois en évidence l’impact majeur des éruptions volcaniques sur l’Humanité au fil des siècles.

― Nedelea Cristian / Shutterstock.com
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