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Les dinosaures se situant entre les reptiles et les oiseaux, les scientifiques se demandent s’ils avaient le sang chaud ou froid. Ayant impliqué l’analyse des marqueurs métaboliques respiratoires présents dans les os de différents groupes de ces créatures, une nouvelle étude apporte des éléments de réponse précieux.

Déterminer les taux métaboliques des dinosaures

Durant les décennies ayant suivi leur découverte, les dinosaures ont été considérés comme des créatures pataudes à sang froid, en raison de leurs similitudes évidentes avec les reptiles modernes. Il a fallu attendre les années 1960 pour que l’idée de géants préhistoriques à sang chaud commence à faire son chemin, grâce à des études révolutionnaires sur l’anatomie des sauropodes géants et la découverte du Deinonychus, prédateur agile ayant notamment inspiré les vélociraptors de Jurassic Park.

Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Nature, des chercheurs de l’université de Yale ont utilisé une approche innovante afin d’étudier les taux métaboliques de ces animaux disparus.

Le métabolisme se résume essentiellement à l’efficacité avec laquelle l’organisme convertit l’oxygène en énergie. Les animaux à sang chaud ou endothermiques ont un taux métabolique élevé, ce qui les oblige à respirer de grandes quantités d’oxygène et à manger davantage pour maintenir leur température corporelle. Les créatures à sang froid ou ectothermes, en revanche, ont un taux métabolique plus faible : elles respirent et mangent moins, mais comptent sur la chaleur de leur environnement pour se réchauffer.

Vue au microscope de tissus mous extraits des os d’un allosaure — © J. Wiemann

Lorsque l’animal respire, il déclenche une cascade de réactions biologiques qui entraînent la production de déchets moléculaires se fixant sur leurs os. Leur quantité s’avère directement liée à celle d’oxygène respirée, ce qui permet de savoir si l’animal avait le sang chaud ou froid et il s’avère que de tels marqueurs survivent au processus de fossilisation.

55 groupes d’animaux éteints et modernes étudiés

Les auteurs de la nouvelle étude ont utilisé différentes techniques de spectroscopie pour examiner ces marqueurs moléculaires dans les fémurs de 55 groupes d’animaux éteints (dinosaures, ptérosaures, plésiosaures…) et modernes (oiseaux, mammifères, reptiles…). Le métabolisme des groupes vivants étant bien connu, l’équipe a pu comparer les profils moléculaires de leurs os à ceux des créatures disparues, et ainsi déduire leur taux métabolique.

De façon surprenante, il s’est avéré que la plupart des espèces préhistoriques étaient à sang chaud, notamment les ptérosaures, les plésiosaures, les sauropodes (dinosaures à long cou comme le Brachiosaurus) et les théropodes (dinosaures prédateurs comme le T. rex). Certains d’entre eux présentant même des métabolismes supérieurs à ceux des mammifères, plus proches de ceux des oiseaux.

D’autres, comme le stégosaure et le tricératops, semblaient avoir un métabolisme plus lent, comparable à celui des reptiles modernes à sang froid, éclairant les scientifiques sur leur mode de vie.

Illustration montrant une partie des animaux étudiés. Leurs taux métaboliques et stratégies thermophysiologiques sont représentés par un code couleur, les teintes oranges caractérisant les taux métaboliques élevés (sang chaud), et les teintes bleues les taux métaboliques faibles (sang froid). De gauche à droite : plésiosaure, stégosaure, Diplodocus, allosaure et colibri moderne — © J. Wiemann

Un éclairage précieux

« Les dinosaures avec des taux métaboliques plus faibles auraient été, dans une certaine mesure, dépendants des températures extérieures », souligne Jasmina Wiemann, auteure principale de l’étude. « Les lézards et les tortues se prélassent au soleil, et nous devrions peut-être envisager une thermorégulation comportementale similaire chez les ornithischiens dont les taux métaboliques s’avéraient exceptionnellement bas. Les dinosaures à sang froid auraient également pu devoir migrer vers des climats plus chauds pendant la saison froide, ce qui aurait largement conditionné leur aire de répartition. »

Les animaux à sang chaud auraient de leur côté mené une existence plus active, impliquant une alimentation plus importante et plus fréquente. Les sauropodes géants, par exemple, auraient été plus ou moins constamment en train de se nourrir de feuilles.

« Ces recherches apportent un éclairage fascinant sur la physiologie et le comportement des dinosaures et d’autres espèces disparues, et fournissent également un nouvel outil scientifique pour les étudier », conclut Wiemann.

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