S’il existe des normes limitant l’émission d’oxyde d’azote par les voitures fonctionnant au diesel, la moitié de ces véhicules dans le monde ne les respecte pas. Un constat publié dans la revue Nature et qui vient alimenter le « dieselgate »…

Les constructeurs trichent

Si les fabricants parviennent à commercialiser des voitures qui ne respectent pas les normes, c’est qu’ils utilisent des logiciels truqueurs, comme avouait Volkswagen en 2015, lors du scandale qui le concernait. Il avait ainsi pu mettre sur le marché 11 millions de véhicules interdits. Depuis, la justice a également ouvert une instruction contre PSA, Renault, et Fiat-Chrysler.

Une étude très sérieuse

Cette nouvelle étude, parue le 15 mai dans Nature, a été menée par la même ONG qui avait dévoilé le scandale de VW : le Conseil international pour un transport propre (ICCT), en collaboration avec plusieurs instituts scientifiques, comme l’Environment Halth Analytics et l’université du Colorado. Lors de ses tests en conditions réelles de 2013 sur trois VW, l’organisation avait prouvé que les normes américaines étaient largement dépassées.

Cette fois, l’étude concerne 11 des pays les plus gros constructeurs automobiles : Union européenne (UE), Etats-Unis, Chine, Inde, Russie, Australie, Brésil, Mexique, Canada, Japon et Corée du Sud, qui concentrent plus de 80 % du marché, et concernent autant les véhicules légers que les poids-lourds.

En laboratoire, les tests estimaient à 8,6 millions de tonnes la quantité d’oxyde d’azote émise, tandis que les conditions réelles atteignent les 13,2 millions de tonnes. En clair : au niveau mondial, un quart des véhicules légers et un tiers des poids-lourds dépassent les normes.

Recoupées avec des études épidémiologiques, les études scientifiques révèlent que 38 000 décès prématurés (cancers du poumon, infarctus, accidents vasculaires cérébraux) sont liés à ces dépassements. Si rien n’est fait, d’ici 2040, ce chiffre sera porté à 174 000 décès par an.

Le cas de l’Europe

L’Europe est la seule région du monde où les décès sont davantage liés aux émissions des véhicules légers qu’aux poids-lourds : les premiers ont entrainé 6900 décès en 2015, les seconds 4600. « Il y a deux raisons principales à cette singularité, explique au Monde Susan C. Anenberg, co-auteure de l’étude et fondatrice de l’EHA. La large flotte de voitures particulières roulant au diesel [plus de 8 millions de ventes en 2016] et le manque de tests robustes d’émissions dans de vraies conditions de conduite ».

Après le « dieselgate », la Commission européenne a décidé d’obliger les constructeurs à se livrer à des tests en conditions réelles et non plus seulement en laboratoire à partir de septembre 2017. En 2020, une nouvelle norme d’homologation, « Real Drive Emission » (RDE) sera mise en place pour que le seuil de tolérance soit abaissé à 1,5 fois au lieu de 2,1 fois la norme. Mais Susan C. Anenberg explique que des contrôles plus poussés pourraient diminuer les émissions de 70 % supplémentaires. Pour Ray Minjares, co-auteur de l’article et responsable du programme Clean Air à l’ICCT, la RDE pourrait même rendre négligeables les émissions d’oxyde d’azote des véhicules diesel.

Le cas de la France

Le décret d’application du plan national de réduction des émissions de pollution atmosphérique publié par Ségolène Royal prévoit de diminuer de 69 % les émissions globales d’oxyde d’azote par rapport à 2005 d’ici 2030. Il faut dire que la France est mise en demeure par Bruxelles pour ses dépassements des normes européennes de qualité de l’air dans dix-neuf zones, notamment l’Ile-de-France. En 2015, 1,6 millions d’habitants étaient exposés à des concentrations excessives de dioxyde d’azote, quarante fois plus toxique que le monoxyde de carbone.

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