C’est une catastrophe écologique de grande ampleur à laquelle nous faisons face actuellement : de plus en plus de dauphins semblent s’échouer sur les plages françaises, surtout sur la côte Atlantique. Ce chiffre ne fait que s’accroître depuis 2016. Au cours de toute l’année 2019, on a trouvé 1233 cétacés échoués sur les côtes françaises. Rien qu’entre janvier et avril 2019, 844 dauphins de cette espèce protégée avaient été retrouvés morts. 2020 ne semble pas se placer sous de meilleurs auspices, dans la mesure ou plus de 600 dauphins de type commun se sont déjà échoués depuis décembre 2019. 

LES SCIENTIFIQUES ET LES ONG TIRENT LA SONNETTE D’ALARME

Les scientifiques de l’Observatoire Pelagis, rattaché à l’université de La Rochelle-CNRS, ont analysé les cadavres de ces dauphins. Il se trouve que la raison de leur mort semble plutôt claire : en effet, on observe sur 95 % de ces cadavres des preuves d’accidents de pêche, qui ont ensuite provoqué la mort de ces cétacés. Le vrai chiffre serait toutefois près de 10 fois plus élevé : les scientifiques estiment le vrai nombre de dauphins morts à 11 300 en 2019. Les filets de pêche feraient en effet couler les cétacés au fond de l’eau.

France Nature Environnement tire la sonnette d’alarme. Apparemment, lors du week-end du 15-16 février, plus d’une centaine d’animaux seraient morts. Il faudrait selon eux interdire certains types de pêche dans le golfe de Gascogne, de façon saisonnière. FNE a formé une alliance avec 25 autres ONG, dans l’objectif de demander à la Commission européenne de mettre en place une procédure contre, entre autres, Paris et quatorze gouvernements européens, tels que des pays Baltiques ou la Galice. Selon eux, la France est loin de prendre des mesures assez ambitieuses concernant ce sujet. 

Sea Shepherd, ONG qui milite en faveur de la protection des écosystèmes marins et de la bioversité, estime que “la France est le pays qui tue le plus de dauphins en Europe, et l’un des pires à l’échelle mondiale”. L’ONG se trouve cet hiver dans le golfe de Gascogne, où elle tente de confronter chalutiers et fileyeurs, tout en tentant de capter l’attention du public.

— Alex Kosev / Shutterstock.com

SEA SHEPHERD INCRIMINE LA PÊCHE INDUSTRIELLE ET INTENSIVE

Il est difficile de savoir ce qui est le plus dangereux pour les dauphins, entre les chalutiers et les filets de dizaines de kilomètres de long, qui obstruent le golfe de Gascogne et qui, de fait, constituent de véritables labyrinthes. Outre la présence des chalutiers et des filets, la pêche industrielle a d’autres conséquences terribles pour toutes les espèces marines, ici les dauphins : de nos jours, ces derniers s’approcheraient trop près des côtes en cherchant du poisson, puisqu’ils n’en trouvent plus au large. 

Sea Shepherd est une ONG qui cherche à marquer les esprits au moyen d’actions provocantes et marquantes. Elle met en rogne de nombreux industriels ; on a pu le voir lorsque leur bateau a été coupé en deux par un chalutier qu’ils avaient mis en colère. Olivier Le Nézet, président du comité régional des pêches de Bretagne, fustige ce qu’il considère comme un harcèlement, puisque Sea Shepherd filme les chalutiers au moyen de caméras et de drones. Selon lui, les navires étrangers sont beaucoup plus responsables que les navires français dans la capture des cétacés. Les propos de Lamya Essemlali, présidente de la branche française, ne leur plaira donc pas, puisqu’elle déclare que « nous reviendrons tant que le problème demeurera. Nous insistons pour que les navires acceptent des contrôleurs et des caméras à bord [ce que réclame aussi FNE]. Certains marins y seraient prêts mais n’osent pas le dire pour ne pas avoir à affronter les autres. »

Une vidéo montrant des marins en train de dépecer un dauphin sur leur bateau avait circulé fin janvier 2020, diffusée par Sea Shepherd. Le Nézet suppose que cette vidéo est truquée, ce que Sea Shepherd réfute. Malheureusement, les militants de Sea Shepherd reçoivent beaucoup de menaces et d’insultes. Ils s’affirment toutefois ouverts au dialogue.

Début février, à Nantes, ils ont exposé un dauphin mort devant le marché de Talensac. Fin janvier, ils ont déposé des dauphins morts en plein centre-ville de Saint-Gilles-Croix-de-Vie en Vendée. Une action en justice a donc été menée contre eux. Ils risquent trois ans de prison et 150 000 euros d’amende pour transport illégal d’espèce protégée. « On verra bien ce que le parquet des Sables-d’Olonne décidera, mais là on s’en prend clairement à ceux qui lancent l’alerte, estime Lamya Essemlali. Et les pêcheurs, que risquent-ils ? Sur 11 300 dauphins tués en 2019, ils n’ont rapporté qu’une dizaine de captures ! »

Malgré tout, il est écrit dans la loi qu’il faut déclarer tout mammifère marin accidenté. La ministre de la Transition écologique déclare ne pas cautionner de tels actes commis par les pêcheurs et marins. Le communiqué affirme également que “la réduction des captures accidentelles de cétacés demeure une priorité pour le gouvernement”. L’une des démarches mises en place par le gouvernement est, par exemple, le fait d’équiper les chalutiers de pingers, soit des “dispositifs acoustiques répulsifs” permettant d’éloigner les dauphins. 

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