— Andrea Izzotti / Shutterstock.com

Les scientifiques ont identifié un squelette presque complet de 4,8 mètres de long d’un ancêtre du dauphin. Celui-ci vivait dans ce qui est aujourd’hui la Caroline du Sud à l’époque de l’Oligocène, il y a environ 25 millions d’années.

Le premier superprédateur à écholocalisation connu

Ce « dauphin » fut le premier prédateur à écholocalisation connu : en plus de sa grande taille, il devait avoir de grandes dents en forme de défenses, et était vraisemblablement capable de se nourrir et de chasser à grande vitesse, comme une orque. Présentées dans la revue Current Biology, ces découvertes pourraient aider les scientifiques à mieux cerner comment les deux types de cétacés modernes – à dents, comme les dauphins, et à fanons, comme les baleines à bosse – ont développé leurs caractéristiques uniques, telles que les nageoires et une propulsion par la queue.

Premier squelette quasi complet d’Ankylorhiza tiedemani a avoir été analysé, celui-ci avait été découvert dans les années 1990, mais avait été dans un premier temps mal classifié. Auparavant, la créature ne pouvait être étudiée qu’à partir d’un fossile partiel du rostre (museau), mais grâce à des procédés récents, il est désormais beaucoup plus aisé d’étudier le cétacé. Et il s’avère que de nombreux aspects du squelette (forme du crâne et de la queue, os du bras court dans la nageoire, forme des dents) suggèrent que les deux types modernes de baleines, à dents et à fanons, ont évolué en parallèle et indépendamment l’un de l’autre, plutôt que d’hériter du même ancêtre comme on le pensait auparavant.

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Vue d’artiste d’Ankylorhiza tiedemani en train de chasser

Des découvertes étonnantes

Selon les auteurs de l’étude, cette évolution parallèle s’est produite en raison des environnements aquatiques similaires qu’elles occupaient : « La mesure dans laquelle les baleines à fanons et les dauphins arrivent indépendamment aux mêmes adaptations globales de nage, plutôt que ces traits évoluant une fois dans l’ancêtre commun des deux groupes, nous a surpris », explique Robert Boessenecker, paléontologue du Collège de Charleston et auteur principal de l’étude. « C’est comme si l’ajout d’os de doigts supplémentaires dans la nageoire et le verrouillage de l’articulation du coude avaient forcé les deux grands groupes de cétacés à suivre une voie d’évolution similaire en termes de locomotion. »

Bien qu’il semble évident que les animaux d’un même environnement évoluent de façon similaire, il ne s’agit pas d’un schéma prédéfini. Les différentes lignées de phoques et d’otaries ont par exemple chacune développé leurs propres modes de nage et se sont retrouvées avec des squelettes post-crâniens d’apparence très différente. Le règne du dauphin géant en tant qu’ancien superprédateur s’est terminé il y a environ 23 millions d’années, lorsque celui-ci s’est éteint. Depuis lors, d’autres baleines et dauphins se sont succédé, mais aujourd’hui, la seule baleine à écholocalisation qui soit aussi un prédateur de pointe est l’orque.

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Le squelette quasi complet étudié par les chercheurs

« Une perspective évolutionniste sans précédent »

« Ce qui rend également cette nouvelle découverte si fascinante, c’est que vous ne penseriez pas nécessairement que l’orque féroce et le gentil dauphin moderne soient étroitement liés, mais l’Ankylorhiza se serait probablement nourri comme l’orque le fait aujourd’hui, il y a des dizaines de millions d’années », poursuit Boessenecker. « Les baleines et les dauphins ont une histoire compliquée et longue, et au premier coup d’œil, vous n’aurez peut-être pas cette impression avec les espèces modernes. Les fossiles ont vraiment ouvert ce long et tortueux chemin de l’évolution, et des fossiles comme l’Ankylorhiza aident à éclairer comment cela s’est passé. »

Jusqu’à récemment, les scientifiques estimaient que les baleines pouvaient avoir hérité de la capacité de se propulser à l’aide de leur queue et de se diriger avec leurs nageoires il y a environ 35 millions d’années. D’autres fossiles d’Ankylorhiza attendent d’être étudiés, et les chercheurs espèrent que ces analyses donneront lieu à de nombreuses autres découvertes.

« Parce que l’époque de l’Oligocène est celle où l’alimentation par filtration et l’écholocalisation ont évolué pour la première fois, et parce que les localités de mammifères marins de cette époque sont rares dans le monde entier, les fossiles de Charleston proposent la vue la plus complète sur les débuts de l’évolution de ces groupes, offrant une perspective évolutionniste sans précédent », conclut le chercheur.

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