
Il arrive parfois que des matériaux inanimés semblent imiter les processus du vivant. Des chercheurs ont découvert un oxyde composé de strontium, de fer et de cobalt, capable d’absorber et de libérer de l’oxygène de manière répétée, en fonction des gaz auxquels il est exposé. Ce cristal pourrait répondre à des besoins critiques dans la production de piles à combustible, qui convertissent l’hydrogène en électricité, tout en ouvrant la voie à de nombreuses autres applications.
Une innovation à basse température
L’oxygène, en raison de sa forte réactivité, peut interagir avec de nombreux matériaux. Cependant, ces réactions sont souvent destructrices ou nécessitent des conditions extrêmes, comme des températures très élevées, limitant ainsi leur utilisation pratique. Inspirée par les processus biologiques, une équipe dirigée par le professeur Hyoungjeen Jeen, de l’université nationale de Pusan, a mis au point un cristal en couche mince capable de « respirer » l’oxygène de manière durable et à des températures relativement basses.
« Ce cristal agit comme s’il avait des poumons : il inhale et exhale de l’oxygène selon nos besoins », explique le professeur Jeen. Ces « respirations » sont contrôlées en alternant l’exposition du matériau à l’oxygène et à un mélange d’hydrogène et d’argon. Contrairement à d’autres matériaux nécessitant des températures très élevées, ce cristal fonctionne à 400 °C, une température bien plus accessible. Les résultats de l’étude sont publiés dans la revue Nature Communications.
Une structure unique et prometteuse
Le cristal, dont la formule chimique est SrFe0,5Co0,5O2,5, repose sur des éléments communs comme le strontium, le fer et l’oxygène. Cependant, la présence de cobalt, un matériau coûteux et controversé en raison des problématiques éthiques liées à son extraction, pourrait complexifier une production à grande échelle.
Malgré cela, le professeur Jeen souligne l’importance de cette découverte. « Ce qui est remarquable, c’est que seuls les ions de cobalt subissent une réduction, menant à la formation d’une structure cristalline totalement nouvelle et stable. » Le fer, bien qu’il ne subisse pas de modification directe, joue un rôle crucial dans la stabilité du cristal.
Le cristal passe d’une structure appelée brownmillerite à une autre connue sous le nom de pérovskite lorsqu’il est réduit avec de l’hydrogène. Ce dernier type de structure est déjà bien connu pour son rôle dans les cellules solaires de pointe. Cette transformation est entièrement réversible, ce qui signifie que le cristal peut passer indéfiniment d’une forme à l’autre sans perdre ses propriétés de base.
Des applications multiples et révolutionnaires
Cette découverte suscite beaucoup d’intérêt, car elle rend les piles à combustible à hydrogène plus compétitives par rapport aux batteries classiques. Ces dispositifs transforment l’hydrogène en électricité en utilisant l’oxygène comme réactif. Or, l’efficacité et le coût de ces systèmes dépendent en grande partie de la manière dont l’oxygène est géré. Un matériau capable de contrôler l’absorption et la libération d’oxygène de façon réversible et économique pourrait donc changer la donne dans la transition énergétique.
Au-delà de son potentiel à améliorer les piles à combustible, ce matériau pourrait être utilisé dans des technologies innovantes comme les fenêtres intelligentes, qui régulent la chaleur en fonction des conditions ambiantes, ou encore dans des transistors thermiques, capables de diriger la chaleur selon les besoins.
Pour le professeur Hiromichi Ohta, de l’université d’Hokkaido, cette découverte marque une avancée majeure. « Ce matériau intelligent, capable de s’adapter en temps réel, ouvre des perspectives incroyables allant de l’énergie propre à l’électronique, sans oublier des matériaux de construction durables. » Par ailleurs, des piles à combustible sodium-air sont capables d’alimenter les avions de ligne.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: IFL Science
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