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Des scientifiques ont utilisé une technique prometteuse pour préserver et faire revivre des tissus cardiaques artificiels pour la première fois, laissant entrevoir un avenir où les organes prélevés pourront être conservés pendant des périodes beaucoup plus longues.

« C’est de la thermodynamique fondamentale »

Mise au point il y a 16 ans par Boris Rubinsky, de l’université de Californie à Berkeley, l’approche au centre de cette percée est connue sous le nom de « surrefroidissement isochorique ». Alors que la congélation isobare classique expose le matériel biologique à une atmosphère à pression constante pour le geler solidement, le procédé isochore l’immerge dans un liquide. Celui-ci est ensuite scellé dans un récipient rigide dépourvu d’air, ce qui empêche la formation de cristaux de glace nocifs, même lorsque les températures descendent en dessous de zéro.

« C’est de la thermodynamique fondamentale », explique le chercheur. « Lorsque le matériau à refroidir est confiné dans une boîte rigide, seule une partie du volume gèle. »

Décrites dans la revue Communications Biology, les dernières expériences de l’équipe ont impliqué du tissu cardiaque cultivé à partir de cellules souches adultes, battant à un rythme similaire à celui d’un cœur humain et présentant des canaux microfluidiques utilisés pour simuler l’exposition des cellules aux nutriments et aux substances médicamenteuses. Celui-ci a été placé dans une chambre de surrefroidissement isochore et refroidi à -3 °C. Les cellules cardiaques ont ensuite été prélevées après 24, 48 et 72 heures, et placées dans un environnement chaud (37 °C).

Les battements spontanés ont repris pour 65 à 80 % des échantillons. Leur examen a montré que le surrefroidissement isochorique n’avait pas modifié l’intégrité structurelle du tissu cardiaque, ni grandement altéré la fréquence ou la forme d’onde des battements, bien qu’il y ait eu une légère tendance à l’augmentation de la durée des battements cardiaques dans le tissu refroidi pendant de plus longues périodes. Le tissu a également continué à réagir à un médicament appelé isoprotérénol, utilisé pour augmenter la fréquence cardiaque.

Une première

« À notre connaissance, il s’agit du tout premier rapport sur le surrefroidissement et la réanimation d’un muscle cardiaque humain artificiel battant de façon autonome », a déclaré Matt Powell-Palm, co-auteur de l’étude.

Réussir à faire revivre du tissu cardiaque conservé dans un état de surrefroidissement pendant un à trois jours constitue une preuve de concept prometteuse pour cette technologie, qui pourrait contribuer à élargir considérablement la fenêtre de temps pendant laquelle les cœurs prélevés restent transplantables, qui ne se mesure actuellement qu’en heures. Pour l’équipe, la prochaine étape consistera à adapter le procédé breveté (s’avérant également prometteur pour la conservation des aliments) afin de pouvoir l’exploiter cliniquement.

« La technologie utilisée pour refroidir les tissus est solide et robuste, mais nous devons maintenant mettre au point des techniques pour réchauffer les tissus de façon homogène », a expliqué Kevin E. Healy, également co-auteur de l’étude. « Cela a été plus facile avec les mini-muscles cardiaques que nous avons utilisés pour cette étude. Travailler sur des organes entiers demandera plus de travail. »

Le procédé a permis de conserver l’intégrité et l’alignement des sarcomères, ou filaments musculaires, composant les tissus cardiaques
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