À l’heure où l’épidémie de coronavirus prend du recul dans certains pays d’Europe, notamment chez nous en France, le virus fait rage plus que jamais dans le reste du monde. Le Brésil fait notamment face à une énorme vague de cas et de morts, faisant du pays le deuxième mondial où l’on recense le plus de morts. Les communautés indigènes ne sont pas épargnées et la mort du charismatique chef Paiakan à 65 ans nous le rappelle.
Un chef opposé aux menaces
La politique risquée de Jair Bolsonaro en matière de santé et d’écologie n’est pas nouvelle. Depuis l’arrivée du coronavirus au Brésil, les mesures de santé prises font débat et les pertes grandissent chaque jour. Malheureusement, personne n’est épargné. Pas même les indigènes, en première ligne face au danger auquel ils font face au quotidien. Récemment, c’est l’un des chefs les plus emblématiques et populaires d’Amazonie qui en fut victime.
Paulinho Paiakan, de son nom complet, était surtout connu pour être l’un des plus fervents défenseurs de la forêt amazonienne. Après avoir contracté le virus le 08 juin dernier, le chef Paiakan fut admis dans un hôpital de la ville de Redencao, au nord du Brésil. Mais mercredi 17 juin, le chef Kayapo a succombé à la maladie. La nouvelle a été annoncée dans la journée par des militants autochtones, puis reprise par nos confrères de l’AFP.
Figure de proue pour la défense de l’Amazonie et des peuples autochtones avec le chef Raoni Metuktire, Paulinho Paiakan fut un soutien de poids remarquable dans les années 1980. À cette époque, le chef s’était fermement opposé à la construction d’un projet hydro-électrique à Belo Monte. Son combat et sa ténacité lui auront permis de rassembler en 1989 à Altamira un grand nombre d’opposants au projet, dont un certain Sting. Coup d’éclat quelque temps plus tard puisque le projet de barrage de la ville fut abandonné, la Banque mondiale retirant ses financements (cependant, le barrage fut construit dans un autre État, le Para, et terminé en 2019).
Une situation délicate
Accusé de viol en 1992 par une étudiante blanche, le chef Paiakan fut acquitté deux ans plus tard avant de devoir effectuer une peine de six années en résidence surveillée. Il était à cette époque en lice et favori pour le prix Nobel de la paix.
Malgré cette zone sombre de sa vie, le chef Kayapo demeurait un modèle pour les peuples autochtones. L’Association des peuples indigènes du Brésil (APIB) le décrit comme « un père, un chef et un guerrier », évoquant « sa tristesse, et sa colère face aux centaines de vies enlevées par la pandémie ». Il faut dire que les peuples autochtones ne sont pas épargnés par le virus. Selon l’APIB, 5 500 autochtones seraient contaminés alors que 287 auraient déjà perdu la vie.
Des chiffres qui inquiètent quand on sait que ces peuples sont démunis et délaissés par tous temps et par les politiciens. Avant de disparaître, le chef Paiakan s’était une dernière fois élevé contre Jair Bolsonaro et sa politique désastreuse envers l’Amazonie et ses projets miniers et agricoles. « C’est quelqu’un qui a travaillé toute sa vie pour créer des alliances mondiales autour des peuples indigènes pour sauver l’Amazonie et les peuples indigènes, indique Gert-Peter Bruch, président de l’ONG Planète Amazone, à l’AFP. C’est vraiment un chef qui avait énormément d’avance sur son temps, poursuit-il. On perd un guide, quelqu’un d’extrêmement précieux […] un des pionniers de cette lutte indigène […]. »
Entachée par un scandale, la vie du chef Paiakan aura tout de même permis de mettre en lumière les dangers climatiques et la vulnérabilité des peuples autochtones face aux industries et politiques menaçantes. Son dévouement pour la protection de l’Amazonie reste l’un de ses plus grands combats.
Le combat du chef Paiakan vous inspire-t-il ?
Par Camille, le
Source: Sciences et avenir
Étiquettes: Amazonie, brésil, foret-amazonienne, coronavirus, chef-Paiakan
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