En Bretagne, les maisons ne sont pas toutes en pierre, garnies de volets colorés, ou surmontées d’un toit de chaume. À Vannes par exemple, Mireille Avril a préféré aux matériaux traditionnels un curieux mélange de bois et de roseau. Célébré par La Fontaine pour sa grande souplesse, le roseau pourrait bien rejoindre le chanvre, la paille et le bois au rang des bio-matériaux.

 

Une filière d’avenir

L’idée d’utiliser le roseau comme matériau de construction revient entièrement à Mireille Avril. Cette ingénieure de 50 ans, reconvertie dans l’éco-conception, milite pour l’implantation d’une filière roseau dans toute la Bretagne, depuis la culture jusqu’à la construction de logements. Un projet audacieux et singulier qui n’a pas manqué de susciter la curiosité de l’Université Bretagne-Sud. Le département d’ingénierie des matériaux de l’établissement et Mireille Avril travaillent de concert à recenser les différentes propriétés de cette plante beaucoup plus robuste qu’elle n’en a l’air.

« Les roselières poussent très vite, sans empiéter sur les terres agricoles, et sans engrais chimique. Là où il faut 30 à 40 ans pour renouveler un arbre, il faut un an pour un roseau »

 

Mireille Avril.

Malgré son apparence frêle et chétive, le roseau est extrêmement résistant aux intempéries; un atout non négligeable en Bretagne. Sans pour autant affirmer qu’il y pleut tout le temps, la météo peut s’y montrer redoutable… Non content d’être un authentique David végétal, le roseau sert aussi à filtrer les eaux de la région qui terminent leur course dans la mer. Mais sa plus grande qualité demeure sans doute son omniprésence dans les terres bretonnes, particulièrement friand des marais situés à proximité du Golfe du Morbihan.

 

La maison roseau, futur de l’écologie ?

Dirigeante de la société RizHome, Mireille Avril a lancé dès 2016 la construction d’une première maison entièrement bâtie grâce au roseau, à Saint-Nolff dans le Morbihan. Le roseau est alors utilisé de deux manières : en bottes pour le bardage de la façade, et broyé pour l’utiliser comme isolant extérieur – une purée de roseau placée dans un coffrage de plusieurs centimètres d’épaisseur. Pas moins de 5 tonnes de roseaux sont nécessaires à la construction d’une bâtisse de 130 mètres carrés, dont le prix est d’ailleurs similaire à celui de pavillons plus « conventionnels ». Seul petit bémol : la façade extérieure est à renouveler tous les 80 ans.

« Le projet s’inscrit dans une démarche de développement durable et local. Nos maisons ne produisent aucun déchet et possèdent une haute performance énergétique, qui en font presque des maisons passives »

 

Mireille Avril.

Portée par le succès de sa toute première création, Mireille Avril espère bien démocratiser l’utilisation du roseau comme matériau de construction via l’implantation de filières dédiées où le roseau prolifère; depuis le repérage de roselières exploitables, jusqu’à la formation aux métiers spécialisés, en passant par la fabrication de machines de coupe solaires. L’ambitieux projet de Mireille Avril s’est même attiré les faveurs de la région Bretagne, qui lui prodigue soutien technique et financier pendant les 18 prochains mois. Ne reste plus qu’à prouver aux investisseurs privés que le roseau est le matériau de demain.

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