C’était il y a déjà cent ans. Le 15 juin 1921, Bessie Coleman devenait la première aviatrice afro-américaine de l’Histoire. Elle a obtenu son brevet au Crotoy, dans le nord de la France, car aucune école américaine acceptait d’élèves noirs à cette époque. Aujourd’hui considérée comme une pionnière de l’émancipation des femmes et des Noirs, Bessie Coleman est une véritable légende. Retour sur son parcours hors du commun.
Première aviatrice afro-américaine de l’Histoire
Bessie Coleman, née à Atlanta en 1892, est une femme d’origine mixte issue d’une mère noire et d’un père amérindien. Elle a grandi au sein de la famille Coleman, composée de 13 enfants et des parents, Susan et George Coleman. En 1917, elle épouse Claude Glenn, mais ils se séparent peu de temps après.
Les parents de Bessie étaient métayers, ils récoltaient du coton pour vivre. Elle a refusé de prendre le même chemin, elle avait une plus grande vision de son avenir. Elle a même déclaré qu’elle voulait « trouver une vie plus grande » et qu’elle voulait « représenter quelque chose ».
D’après sa petite-nièce, Gigi Coleman, qui raconte son histoire dans un spectacle itinérant solo, Bessie a vu en l’aviation l’opportunité qu’elle recherchait. En effet, Bessie Coleman a eu une révélation lorsqu’un de ses frères vétérans, ayant servi en France durant la Première Guerre mondiale, lui a dit de but en blanc : « Women ain’t never going to fly, not like those women I saw in France. » De plus, toutes les écoles d’aviation américaines l’ont refusée pour sa couleur de peau. Alors, sur les conseils de Robert Abbott, éditeur du Chicago Defender, Bessie a décidé de quitter son pays pour poursuivre ses rêves en France. Elle a donc appris la langue française, fait des économies et est partie.
« Queen Bess », « Brave Bess », des surnoms bien mérités !
Arrivée en France, elle se confronte cependant à un problème majeur. Suite à un accident, les écoles de pilotage de Paris sont fermées aux femmes. Décidée, la jeune femme a pris un train pour le nord de la France, pour se rendre dans l’école de pilotage des frères Caudron au Crotoy dans la Somme, une école réputée pour être la meilleure. Elle les a convaincus de lui apprendre l’aviation. Elle était la seule femme et la seule Noire dans sa promotion de douze élèves. Bessie Coleman a déclaré en ces temps sa célèbre citation : « Chaque non me rapproche d’un oui. » Une citation justifiée, car pour se rendre à l’école d’aviation des Caudron, elle a dû marcher une dizaine de kilomètres et une autre pour rentrer.
Le 15 juin 1921, Coleman reçoit son brevet de pilote de la Fédération aéronautique internationale. Grâce à sa licence internationale, elle a pu voler dans les cieux du monde entier. Après cela, elle est allée en Allemagne pour s’entraîner avec des anciens as de l’aviation de la Première Guerre mondiale. Ces derniers lui ont appris à conduire des avions primitifs de cette époque tout en réalisant des exploits aériens plus que dangereux. L’aviation était sa passion. Elle a expliqué à un journaliste que « l’air est le seul endroit exempt de préjugés. Vous n’avez jamais vécu avant d’avoir volé. »
Elle est ensuite retournée aux États-Unis sous le feu des projecteurs, où elle apparait dans les journées de l’aviation et foires locales produisant d’époustouflants spectacles aériens. Elle fait aussi la une des journaux appartenant aux Noirs.
Pionnière de l’émancipation des femmes et des Noirs
Bess Coleman est une héroïne des temps modernes. Elle a influencé plusieurs personnalités de renom telles que Carole Hopson et Mae Jemison.
Carole Hopson n’est autre que la femme de 50 ans ayant plaqué sa carrière dans le marketing d’entreprise pour devenir pilote de ligne commerciale. Elle est à présent premier officier sur des Boeing 737. Elle a avoué avoir été influencée par les actes de l’Afro-Américaine Bessie Coleman. En 2021, elle a même écrit un roman s’intitulant « A Pair of Wings », illustrant les exploits de Coleman. Hopson a proclamé : « Quand j’ai entendu parler de Bessie pour la première fois, je pensais avoir rencontré un super-héros. »
Quant à Mae Jemison, elle a été la première femme astronaute et ingénieure afro-américaine. Le 11 septembre 1992, elle a été acceptée par la NASA pour le vol de la navette spatiale Endeavor.
Une fin tragique
Le 22 février 1923, elle a eu son premier accident aérien à Los Angeles. Elle était à bord de son propre avion, le biplan Curtiss JN-4 surnommé « Jenny ». A 300 pieds au-dessus de la Terre, son moteur a eu un problème et l’avion est tombé. Coleman a eu une jambe cassée, des côtes fracturées et un visage présentant des coupures.
Mais cela ne l’a pas arrêtée, et sur son lit d’hôpital elle a déclaré : « Vous dites au monde que je reviens. Le fait que je sois en vie prouve que voler dans les airs n’est pas plus dangereux que de rouler dans une automobile au sol. » Et effectivement, après des mois de rééducation, elle est revenue et s’est même mise à réfléchir à l’ouverture d’une école de pilotage.
Malheureusement, ce deuxième rêve n’a pas abouti puisqu’elle a trouvé la mort le 30 avril 1926 à Jackson en Floride, à l’âge de 34 ans seulement. A 3 500 pieds, le biplan Jenny a piqué du nez et s’est écrasé, éjectant la jeune femme de l’avion. Elle est morte instantanément, tandis que son mécanicien, un homme blanc aux commandes de l’avion, est mort quelques instants plus tard.
Pour aller plus loin, découvrez également le portrait d’une autre pionnière de l’aviation, Lilian Bland.