Les Philistins frappés par la peste, par Nicolas Poussin (1630) — © Musée du Louvre

En 536 de notre ère, un mystérieux brouillard s’abattait sur l’Europe, le Moyen-Orient et certaines parties de l’Asie. Celui-ci allait bloquer la lumière solaire pendant un an et demi, entraînant une chute spectaculaire des températures et la perte des récoltes.

Une année « sombre »

Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Antiquity, des chercheurs de l’université de Harvard ont étudié une carotte de glace ancienne prélevée sur un glacier suisse et établi qu’une éruption volcanique survenue en Islande au début de l’année 536 était à l’origine de l’épais voile de cendres ayant recouvert l’hémisphère nord. À l’instar de l’éruption du Tambora en 1815 (la plus meurtrière jamais enregistrée), cet évènement s’est révélé suffisamment important pour modifier les schémas climatiques mondiaux et provoquer des années de famine.

À quoi ressemblaient exactement les 18 premiers mois d’obscurité ? Selon l’historien byzantin Procope, « le Soleil projetait une lumière blafarde, semblable à celle de la Lune et les hommes n’étaient à l’abri ni de la guerre, ni de la peste, ni d’aucune autre source de mort ». « Nous nous étonnons de ne pas voir l’ombre de nos corps à midi », écrivait l’homme politique romain Cassiodore, évoquant par ailleurs des saisons « semblant s’être emmêlées ».

De façon assez surprenante, de tels récits étaient considérés comme fantaisistes jusqu’aux années 1990. Au cours de cette décennie, des chercheurs ont examiné les cernes d’arbres en Irlande, révélant un changement drastique du climat vers 536. Les températures estivales ont chuté de 1,6 à 3 °C en Europe et en Asie (certains observateurs chinois faisant même état de chutes de neige en plein été), ce qui a poussé les scientifiques à qualifier cette période de « petit âge glaciaire de l’Antiquité tardive ».

— Ammit Jack / Shutterstock.com

« Ce changement radical s’est produit en une nuit, marquant le début de l’une des pires périodes pour être en vie, si ce n’est la pire année », explique Michael McCormick, co-auteur de l’étude.

Des conséquences durables

Les effets de l’éruption de 536 ont été aggravés par des éruptions en 540 et 547, et l’hémisphère nord a mis longtemps à s’en remettre. « Le petit âge glaciaire de l’Antiquité tardive qui a commencé au printemps 536 a duré jusqu’à environ 660 en Europe occidentale, et 680 en Asie centrale », détaillent les auteurs de l’étude.

Cette période de froid et de famine a provoqué une stagnation économique en Europe s’étant intensifiée en 541 lorsque la première vague de peste bubonique (ayant tué entre 30 et 50 % de la population de l’Empire byzantin, ou Empire romain d’Orient) a éclaté.

« S’il est possible que d’autres éruptions volcaniques non identifiées aient contribué à l’épais voile de cendres s’étant abattu sur l’hémisphère nord en 536, nous connaissons désormais sa principale source », conclut Andrei Kurbatov, également co-auteur de l’étude.

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Michel - Louis LONCIN
Michel - Louis LONCIN
2 années

Plutôt que de nous casser les pieds avec le « réchauffement climatique (et de nous en faire payer les conséquences), on ferait bien d’examiner d’autres causes…

haegelen jean luc
haegelen jean luc
2 années

Imaginons un peu un peu des catastrophe naturelle même envergure, mais aujourd’hui, bien les conséquences risque d’être bien pire que ce qui s’est passé à cette époque. Je me demande quel serait le comportement des populations gâter comme nous le sommes aujourd’hui, devant des pénurie alimentaire.