Ce vendredi 15 novembre, des ONG ont dénoncé par de glaçantes images les conditions déplorables des exportations de bovins français vers des pays du Moyen-Orient ou du Maghreb. Selon elles, ces animaux subissent d’atroces conditions d’abattage qui ne sont absolument pas encadrées.

LE TRAITEMENT ABOMINABLE DE CES ANIMAUX

Voici ce qui a été dénoncé à travers d’horribles images filmées en caméra cachée par l’organisation Animals International au Maroc, en Tunisie et au Liban et diffusées par l’association Welfarm. Les bovins y sont pendus par les pattes avant d’être indignement égorgés. « Nous cautionnons à l’étranger des choses que nous interdisons sur notre propre territoire. C’est une hypocrisie que la France ne peut plus se permettre », s’est indignée Adeline Colonat, chargée de la campagne contre l’export d’animaux vivants de Welfarm.

Les ONG à l’origine de ces dénonciations font référence à un arrêté de 1997 du code rural relatif aux conditions de mises à mort des animaux ou à la réglementation européenne en matière d’abattage. Elles précisent également que « tous les textes en vigueur en France s’opposent à ces pratiques. La France exporte des animaux vers des pays dont la majorité des abattoirs n’ont pas les infrastructures nécessaires pour respecter les normes établies par l’Organisation mondiale pour la santé animale (OIE). »

— Sorapong / Shutterstock.com

Afin de mettre fin à ces atrocités, Welfarm et cinq autres associations, Compassion In World Farming (CIWF), L214, Eurogroup for Animals, la Fondation droit animal (FDA) et la Fondation Brigitte Bardot, ont adressé une lettre à Edouard Philippe. Elles souhaitent que le gouvernement agisse d’urgence afin d’interdire les exportations d’animaux vers les pays qui ne sont pas en mesure d’établir les normes européennes exigées. Ces bovins français subissent donc des traitements qui sont purement contraires aux réglementations françaises, mais aussi européennes. Ils sont transportés tels de vulgaires déchets dans des moyens de transport ressemblant fortement à des « camions poubelles ».

En 2017, des images filmées dans un abattoir marocain ont dénoncé les conditions de vie d’une vache française qui vivait entre des cadavres gisant sur le sol. D’autres images révèlent que l’une d’entre elles a été placée seule, en plein soleil et sans eau une journée entière, tout simplement parce qu’elle était plus âgée et plus grosse que les autres. « J’ai visité de très nombreux abattoirs dans le monde, mais ce que j’ai vu ce jour-là est l’abattoir le plus chaotique et horrifique« , s’est horrifié Gabriel Paun, directeur d’Animals International Europe et à l’origine de ces dénonciations. En 2018, c’est au Liban que d’autres images ont été filmées. On y aperçoit un taureau français accroché par les pattes, les yeux crevés par un abatteur avant d’être égorgé sans pour autant avoir été immobilisé. Des méthodes horrifiques totalement interdites par l’OIE.

« L’année dernière, les pays tiers du pourtour méditerranéen ont importé 2,8 millions de bovins vivants, soit deux fois plus qu’en 2012 », expliquent également les ONG. Les importations des pays du pourtour méditerranéen ont doublé en l’espace de six années. L’Algérie a importé plus de 50 000 bovins français en 2018, le Maroc 4 000 en 2012 contre 11 000 en 2017 et l’Israël, nouveau marché de l’élevage français, 17 000 agneaux entre les mois de février et de juin 2019.

DES CONDITIONS ATROCES QUI PROFITENT À L’INDUSTRIALISATION

Ce commerce d’animaux d’élevage avait rapporté jusqu’à 118 millions d’euros à la France en 2018. La branche de l’industrialisation semble donc avant tout vouloir faire le maximum de bénéfices, au détriment du bien-être animal et en faisant subir à ces animaux des conditions de vie atroces. Exporter les animaux vivants plutôt que des carcasses a un intérêt purement économique.

« Leur objectif est de conserver des emplois et de la valeur ajoutée locale, en faisant travailler les engraisseurs, les abatteurs. Si on fait venir de la viande prête à consommer, elle va directement du port au supermarché. » Une manière pour la France d’exporter davantage d’animaux. Malheureusement, après les avoir vendus, les éleveurs sont bien souvent inconscients des conditions atroces qu’ils subissent. « Ces images choquantes illustrent les dérives de l’industrialisation, qui chosifie les animaux, et en font une matière première sur laquelle on spécule », réalise Guillaume Betton, éleveur dans la Creuse.

UN MANQUE CRUCIAL DE CONTRÔLES

Lors des exportations, divers contrôles sont réalisés de manière imprévue, et ce avant les départs des camions et aux abords des frontières européennes. Néanmoins, les contrôles restent insuffisants, majoritairement peu pertinents et parfois inexistants une fois les frontières franchies, explique Francesca Porta, membre de l’association Eurogroup for Animals, alors que « la Cour de justice européenne a statué en 2015 que les normes de l’UE relatives au transport d’animaux doivent s’appliquer pendant toute la durée du trajet, y compris à l’extérieur de l’Union européenne ».

« Les autorités européennes peuvent effectuer des inspections dans les abattoirs des pays tiers, seulement si la viande est destinée au marché européen », explique également Francesca Porta au sujet des abattoirs de destination tout en précisant que l’Union européenne n’a aucun mandat afin des les contrôler.

« FAVORISER, LORSQUE CELA EST POSSIBLE, UNE TRANSITION VERS LE TRANSPORT DE VIANDE OU DE CARCASSES, PLUTÔT QUE D’ANIMAUX VIVANTS » ?

« Outre l’état de l’animal et la feuille de route de transport, le vétérinaire doit s’assurer que l’animal ne sera pas soumis à des souffrances inutiles dans son pays de destination. S’il est avéré qu’un pays enfreint les règles élémentaires de protection animale, le vétérinaire se doit de refuser de signer l’autorisation de sortie. Autrement il se rend complice de mauvais traitement », explique Alexander Rabitsch, vétérinaire autrichien en Carinthie ayant réalisé diverses inspections de transports d’animaux vers des pays tiers. Ce manque de considération envers le bien-être animal a donc mené, au mois de février 2019, à l’annulation d’exportations de bêtes depuis l’Allemagne vers l’Ouzbékistan. Par ailleurs, au mois de mars 2019, en Bavière, ce sont des exportations vers 17 pays qui ont été suspendues.

Au mois de février 2019, le Parlement européen a constaté que les animaux subissaient « des souffrances aiguës et prolongées » au sein des abattoirs. Des ONG et le Parlement ont donc fait appel à la Commission européenne en lui demandant de « favoriser, lorsque cela est possible, une transition vers le transport de viande ou de carcasses, plutôt que d’animaux vivants ». « Une réflexion approfondie entre acteurs publics et privés » est nécessaire selon le ministère de l’Agriculture français. Une problématique qui pose, selon lui, la question « des équilibres économiques, en premier lieu pour les éleveurs ». « La France s’est impliquée pour qu’un observatoire des normes internationales, y compris sur le bien-être animal, placé au sein de l’OIE, puisse être créé. »

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magnan
magnan
4 années

L’article montre bien que ce sont les pays musulmans qui n’ont aucune considération pour les animaux. Il faudrait donc dénoncer ces atrocités auprès de tous ces pays mais aussi auprès des musulmans qui vivent en Europe. Faire des sitting devant leurs ambassades et consulats en Europe et arrêter d’accuser les… Lire la suite »

Brequel
Brequel
4 années

Je suis dégouté de ce que je lis et ce n’est pas nouveau. Comment peut-on accepter de telles horreurs j’en suis arrivé à ne plus manger de viande. Il y a assez de maltraitances en France sans encore envoyer nos braves bêtes ce faire torturer à l’étranger. J’en ai marre… Lire la suite »