Et si la preuve d’une vie martienne ne dépendait pas d’un nouvel outil révolutionnaire, mais d’un signal chimique discret déjà détectable par les instruments embarqués sur Curiosity ou Perseverance ? C’est ce que suggère une équipe britannique, qui propose une méthode simple, concrète et potentiellement historique.

Des molécules ultra-fragiles pourraient révéler une activité biologique actuelle sur Mars
Pour détecter la vie, il faut traquer les bons indices. Certaines molécules, comme les lipides polaires intacts (IPL), sont d’excellents marqueurs biologiques. Ces lipides composent les membranes cellulaires, éléments fondamentaux de toute forme de vie.
Sur Terre, les scientifiques s’en servent pour mesurer la biomasse microbienne dans des milieux extrêmes, comme les sédiments profonds des océans.
Leur intérêt est double. Premièrement, ils ne peuvent provenir que de cellules vivantes ou tout juste mortes. Deuxièmement, ils se dégradent en quelques heures après la mort d’un organisme. Par conséquent, si on détecte des IPL dans un échantillon martien, il y a de fortes chances qu’ils soient liés à une activité biologique récente.
Les rovers possèdent déjà les outils pour détecter ces traces de vie récentes
Fait remarquable : les outils pour identifier ces molécules sont déjà sur Mars. En effet, les rovers Curiosity et Perseverance, tout comme le futur rover Rosalind Franklin de l’ESA, embarquent un chromatographe en phase gazeuse couplé à un spectromètre de masse (GC-MS).
Cet instrument chauffe les échantillons et analyse leurs composants chimiques. Il a déjà permis d’identifier plusieurs molécules organiques complexes.
De plus, les chercheurs Solomon Hirsch et Mark Sephton, de l’Imperial College London, ont montré que cet appareil peut aussi repérer la signature spécifique des IPL. Ils ont testé l’appareil avec des bactéries vivantes et obtenu un pic très distinct.
En d’autres termes, si un jour les données des rovers affichent ce type de signal, les chercheurs pourraient conclure, avec une certitude inédite, à la présence d’une vie actuelle ou tout juste éteinte sur Mars.
Cette méthode pourrait aussi fonctionner sur les lunes glacées de Jupiter
Cette approche va bien au-delà de Mars. En effet, les scientifiques envisagent déjà de l’appliquer à d’autres corps célestes. Notamment aux lunes glacées de Jupiter, comme Europe.
Ces mondes cachent des océans d’eau liquide sous une épaisse couche de glace. Ainsi, ils pourraient héberger des formes de vie microbienne.
Si des instruments similaires au GC-MS sont embarqués sur les futures missions, ils pourraient aussi détecter les IPL dans ces environnements extrêmes.
Ce serait alors un changement radical pour l’astrobiologie. L’objectif ne serait plus seulement de trouver des traces de vie ancienne. Il s’agirait plutôt de repérer une vie active, en temps réel, dans notre Système solaire.
Une technologie déjà en usage pourrait répondre à la plus vieille question de l’humanité
Jusqu’ici, aucune preuve directe de vie extraterrestre n’a été confirmée. Cependant, grâce à ces lipides discrets mais révélateurs, et aux outils déjà présents sur les rovers, nous pourrions bientôt disposer d’un moyen fiable pour répondre à l’une des plus grandes questions de l’humanité : sommes-nous seuls dans l’Univers ?
Et si la réponse ne tenait qu’à une molécule fragile, dissimulée dans un échantillon de poussière martienne ? Et si un pic d’analyse, encore mal interprété, contenait cette réponse ?
Peut-être que la preuve existe déjà, quelque part dans les données collectées. En fin de compte, il ne manque plus qu’à poser la bonne question… au bon endroit.
Par Eric Rafidiarimanana, le