Une baleine morte en Islande via Shutterstock
Alors que l’Homme pollue déjà l’atmosphère, l’espace et les océans avec ses déchets, il est un type de nuisance qui reste encore trop méconnu : le bruit océanique. SooCurious vous présente ce phénomène dramatique mais pas irrémédiable.
Un matin, sur une plage des Bahamas, le scientifique spécialiste des baleines Ken Balcomb a trouvé l’un de ces animaux échoués. Avec l’aide d’assistants, il a essayé de repousser le gigantesque mammifère vers des eaux plus profondes mais celui-ci est revenu vers la rive. Ce jour-là, ce ne sont pas moins de 17 baleines à bec, ou Ziphiidae, que les chercheurs ont découvertes échouées sur les plages des Bahamas.
Ken Balcomb a alors voulu savoir pourquoi ces cétacés, qui vivent normalement en eaux très profondes, s’échouaient sur les plages. Il a donc envoyé certains spécimens à un laboratoire, dont les analyses ont montré une hémorragie dans le cerveau et autour des oreilles.
Finalement, le problème s’est avéré être un bruit extrême issu de tests de sonar effectués par des navires de guerre qui avait poussé les baleines à tenter de sortir de l’eau. Cet évènement, nommé « mass beaching », ou échouage massif, est présenté dans « Sonic Sea », un documentaire qui explique comment les sons humains impactent la vie dans les océans.
Au cours du dernier demi-siècle, avec l’augmentation du fret et de l’exploration pétrolière en mer profonde, le bruit de fond dans l’océan a doublé à peu près tous les 10 ans. Par exemple, un porte-conteneurs géant peut émettre 190 décibels dans l’eau, soit plus qu’un haut-parleur à un concert de rock. Or dans les océans du globe, il y a en permanence 60 000 navires commerciaux.
« Le son est absolument inéluctable » selon Michael Jasny, directeur du Marine Mammal Protection Project at the Natural Resources Defense Council, un des producteurs de « Sonic Sea ». D’après lui, il est indispensable de comprendre que « l’océan est un monde sonore » et que « les mammifères marins, les poissons et les autres espèces marines ont évolué en dépendant de leur audition comme sens premier ».
Prenant l’exemple de la baleine, Michael Jasny explique qu’elle « peut à peine voir sa propre queue dans l’eau » mais que ces animaux sont pourtant capables de « communiquer entre eux à travers des bassins océaniques entiers ».
Car si la lumière ne peut voyager très loin dans l’eau, le son, lui, en est capable. Ainsi, au cours d’une expérience, des chercheurs ont émis un son dans l’océan Indien et ont été en mesure de le détecter à la fois depuis l’Etat de Washington, à l’ouest des Etats-Unis, jusqu’à l’océan Atlantique, de l’autre côté du pays.
Au cours d’une autre étude, des chercheurs qui écoutaient le son des baleines au milieu de l’océan Atlantique n’ont plus été capables de l’entendre lorsque le bruit des forages de pétrole et de gaz a commencé en Afrique occidentale.
Selon Michael Jasny « la mer est en train d’être industrialisée et cela a un impact sur le monde acoustique dans lequel les animaux marins doivent prospérer ». Car le son constant a un impact sur la manière donc les organismes marins recherchent leur nourriture, communiquent ou se déplacent dans les océans. Par exemple, les baleines noires, une espèce menacée vivant dans l’Atlantique Nord, ne peuvent plus entendre les individus de leur espèce pendant 80 % du temps.
Reste que tout n’est pas perdu et qu’une technologie de meilleure qualité pourrait considérablement réduire le bruit. Par exemple, les foreurs de pétrole et de gaz utilisent généralement des explosions de dynamite pour cartographier le plancher océanique. Mais il est également possible d’utiliser la vibrosismique marine, une technologie beaucoup moins invasive.
De la même manière, certaines compagnies commencent à utiliser la technologie pour disposer de bateaux plus silencieux. Mais il est aussi possible de réduire le bruit simplement en ralentissant. Et comme il est très fréquent que les navires marchands attendent trois jours dans un port après leur arrivée, certains experts affirment qu’il n’y aucune raison de ne pas ralentir.
Selon Michael Jasny, la bonne nouvelle est que le bruit est « un problème qui peut être résolu » et qui ne pèse pas pendant longtemps sur l’environnement lorsqu’il a cessé d’être émis.
Pour tenter de réduire la pollution sonore que l’homme produit dans les océans, l’Organisation maritime internationale a adopté des directives en 2014 pour rendre la navigation maritime plus calme. Selon Michael Jasny, il ne reste plus qu’à « obtenir la mise en oeuvre de ces mesures et d’obtenir des ports qu’ils entreprennent de réduire le bruit ».
Ces travaux et témoignages lèvent le voile sur un problème trop méconnu : celui du bruit océanique, résultat des activités humaines, comme tant d’autres nuisances. Si l’avenir des mers du globe vous intéresse, découvrez pourquoi les océans n’auront bientôt plus l’oxygène nécessaire à la survie du monde marin.
Par Maxime Magnier, le
Source: Fastcoexist
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