
Dans les entrailles d’une étoile mourante, des scientifiques viennent de lever le voile sur un phénomène insoupçonné. Grâce au télescope spatial Chandra, une équipe internationale a découvert dans le vestige de la célèbre supernova Cassiopée A des indices uniques sur les derniers instants d’une étoile massive. Une révélation qui bouleverse notre vision des explosions stellaires. Explications.
Cassiopée A, une supernova pas comme les autres
Il y a environ 11 300 ans, une étoile géante située dans la constellation de Cassiopée a atteint la fin de sa vie. Avec une masse estimée entre 15 et 30 fois celle du Soleil, probablement une supergéante rouge ou une étoile de type Wolf-Rayet, elle a fini par s’effondrer sur elle-même avant d’exploser en supernova.
La lumière de cette déflagration est parvenue jusqu’à la Terre vers les années 1660, mais aucun témoignage direct de l’événement n’existe. Aujourd’hui, son vestige, connu sous le nom de Cassiopée A (Cas A), est l’un des restes de supernova les plus étudiés.
Les observations réalisées avec le télescope à rayons X Chandra ont été analysées dans une étude parue dans The Astrophysical Journal, dirigée par Toshiki Sato (université Meiji, Japon). L’équipe a combiné ces données à des modèles informatiques avancés, et les résultats sont pour le moins surprenants.

Des couches stellaires en fusion chaotique
Comprendre les toutes dernières heures précédant une explosion stellaire est un défi. Elles se déroulent avant que la supernova elle-même n’attire l’attention des astronomes. Au cœur d’une étoile massive, les couches se succèdent par ordre de poids atomique : hydrogène, hélium, carbone, puis oxygène, silicium, jusqu’au fer. Mais ce dernier marque un point de non-retour. Lorsqu’il s’accumule, l’étoile ne peut plus se maintenir et son noyau s’effondre.
Les chercheurs ont découvert que, juste avant son explosion, Cas A a connu une perturbation violente : une couche interne riche en silicium s’est déplacée vers l’extérieur et s’est mélangée à une couche voisine pleine de néon. Ce processus, appelé « fusion de coquilles », a provoqué un brassage hétérogène de matière.
Des poches riches en silicium se sont retrouvées côte à côte avec des zones saturées en néon, un phénomène jamais observé auparavant bien qu’il ait été prédit par les modèles astrophysiques. Pour les chercheurs, il s’agit de la première preuve observationnelle que la structure interne d’une étoile peut être bouleversée quelques heures seulement avant son explosion.

Une explosion asymétrique qui change tout
Pendant longtemps, les astrophysiciens pensaient que les supernovas à effondrement de cœur explosaient de façon symétrique. Mais Cassiopée A raconte une autre histoire. Ce mélange chaotique de couches a laissé derrière lui une asymétrie marquée dans le nuage de débris observé aujourd’hui.
Cette irrégularité pourrait expliquer certains mystères, comme la vitesse inhabituelle des étoiles à neutrons issues de ces explosions. Plus encore, les turbulences internes engendrées par cette fusion de coquilles auraient pu jouer un rôle décisif dans le déclenchement même de la supernova.

« L’effet le plus important de ce changement est peut-être qu’il a contribué au déclenchement de l’explosion », souligne Hiroyuki Uchida (université de Kyoto), co-auteur de l’étude.
En révélant ce désordre insoupçonné au cœur d’une étoile mourante, Chandra offre aux astrophysiciens un aperçu inédit de l’instant critique qui décide du destin d’une étoile. Une étape qui, loin d’être paisible, pourrait être bien plus chaotique et violente qu’on ne l’imaginait.
Par ailleurs, le nouveau télescope japonais révèle de nouvelles informations sur les trous noirs et les supernovas.
