ben-navisLe Ben Nevis via Shutterstock

Symbole de la puissance des éléments qui ont façonné la Terre il y a plusieurs milliards d’années, les montagnes font l’objet d’observations minutieuses depuis des siècles. Mais une incertitude pèse toujours sur leur hauteur, qui varie considérablement selon les calculs et les méthodes utilisées. SooCurious vous présente cette bizarrerie scientifique.

Sur toutes les cartes actuelles, le Ben Nevis, le plus haut sommet de Grande-Bretagne, est répertorié à 1344 mètres de haut. Pourtant, il s’élève en réalité à 1344,527 mètres, soit 1345 mètres après arrondi par le haut. C’est le consultant en géodésie – la science chargée de calculer les tracés des cartes et de résoudre les problèmes de dimensions  – Mark Greaves, de l’Ordnance Survey, l’organisme chargé de cartographier le Royaume-Uni, qui a découvert cette différence.

 

Mark Greaves :

Mark-Greaves

A l’automne 2015, le scientifique a fait une nouvelle mesure à haute précision grâce à une méthode employant la technologie GPS. Selon Greaves, deux heures de suivi par 12 satellites de navigation ont été nécessaires pour effectuer la mesure. Durant ce laps de temps, un demi-million de bits ont été reçus et enregistrés par un appareil GPS au sommet du Ben Nevis, des données de temps et sur la longueur d’onde des signaux.
Car même si les signaux se déplacent à la vitesse de la lumière, il leur a fallu quelques microsondes pour effectuer la distance satellites-Terre, comme l’explique le consultant en géodésie : « Parce que le code du satellite doit parcourir 20 000 km, il est retardé dans le temps. Donc, le récepteur dispose d’un code qui est décalé. » Dès lors, en observant le décalage, il est possible de déterminer exactement à quelle distance du récepteur se trouve la position des satellites dans l’espace.

 

Le Ben Nevis : 

Ben-Nevis-2

Après cela, les données de trois satellites ou plus sont utilisées pour calculer la position en 3D du récepteur. Et c’est là la première bizarrerie intéressante du processus, puisqu’il est nécessaire de débuter par la mesure de la distance d’un satellite, et non pas celle de la hauteur du pic en lui-même.

Finalement, en combinant cette information avec des données provenant d’autres récepteurs plus permanents de l’Ordnance Survey à proximité, il est possible de calculer ce que doit être la lecture la plus précise et donc, la hauteur au-dessus du niveau de la mer, ce qui donne le résultat final.

 

Le Ben Nevis : 

Ben-Nevis

Reste que chaque montagne n’est pas mesurée aussi précisément que cela. En Grande-Bretagne, notamment, de nombreux pics sont étudiés depuis les airs en utilisant une technique appelée photogrammétrie. Elle implique de voler au-dessus d’une colline ou d’une montagne et de prendre une série de photographies qui peuvent ensuite être analysées pour produire un modèle 3D. Et parce que le modèle sera parfaitement à l’échelle, la hauteur peut être raisonnablement bien estimée. Mais elle n’est pas aussi précise que la méthode GPS.

Egalement, partout dans le monde, de nombreux pics, soit à cause de leur obscurité, soit parce qu’ils sont trop escarpés, n’ont jamais été mesurés avec la précision de la méthode GPS. C’est le cas, par exemple, du Hkakabo Razi, au Myanmar. Ainsi, en septembre 2015, National Geographic a rapporté une tentative de mesure pour calculer la hauteur de cette montagne d’Asie du Sud-Est. Finalement, l’expédition a été confrontée à des conditions et des difficultés telles que les grimpeurs ont été incapables de remplir leur tâche et que la hauteur réelle du Hkakabo Razi reste sujette à débats.

 

Le Hkakabo Razi : 

Hkakabo-Razi

De la même manière, de nombreux sommets de la cordillère des Andes, en Amérique du Sud, n’ont jamais été mesurés de manière concluante. Comme la colline Cerro Paradones, qui est estimée, selon les différentes sources, entre 4900 et un peu plus de 5000 mètres.

Plus impressionnant encore, Ulugh Muztagh, un pic des montagnes de Kun-Lun, en Asie, a vu sa hauteur revue à la baisse de 7723 mètres à 6973 mètres en 1985 à la suite d’une expédition sino-américaine, preuve des incroyables écarts existants entre les méthodes utilisées.

 

Ulugh Muztagh :

Ulugh-Muztagh

De même, l’Everest aussi a fait l’objet de débats, puisqu’en 2011, le Népal a tenté d’en contester la mesure officielle, établie à 8848 mètres, avec sa propre étude de la montagne. Ainsi, le pays a fait valoir que la hauteur au sommet du pic devait être incluse dans la mesure de la hauteur, mais, semble-t-il, la Chine n’était pas d’accord.

Enfin, il y a aussi le cas des montagnes que personne n’a encore escaladées, comme le Labuche Kang, qui se trouve sur le bord de l’Himalaya, au Tibet. Sa hauteur est inconnue mais est estimée à 7200 mètres par deux cartes chinoise et russe de la région.

Labuche-Kang Le Labuche Kang via Shutterstock

Ces différences dans les hauteurs calculées des montagnes de notre planète sont stupéfiantes. Mais elles illustrent le chemin qu’il reste encore à parcourir à l’espèce humaine pour connaitre et maitriser parfaitement son environnement. Si les montagnes vous passionnent, découvrez-en 13 parmi les plus majestueuses qui sont pourtant les plus meurtrières au monde.

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