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Des physiciens obtiennent la mesure la plus précise de la durée de vie d’un neutron

Celle-ci pourrait notamment permettre de résoudre les mystères de la matière noire et des premiers instants de l’Univers

— vchal / Shutterstock.com

Une nouvelle expérience étonnante a permis aux physiciens de mesurer la durée de vie d’un neutron libre de façon beaucoup plus précise. Cette avancée pourrait aider à sonder les limites du modèle standard de la physique des particules, ainsi que les mystères de la matière noire et des premiers instants de l’Univers.

Une mesure controversée

Les neutrons se trouvent principalement dans le noyau des atomes, mais ils peuvent également être produits de manière autonome par des processus tels que les réactions nucléaires ou les rayons cosmiques qui interagissent avec les atomes dans l’atmosphère. Ces « neutrons libres » sont instables et se désintègrent en un proton, un électron et un antineutrino, mais la durée exacte de ce processus fait débat.

Les physiciens mesurent la durée de vie moyenne des neutrons libres à l’aide de deux méthodes principales. La première consiste à placer des neutrons libres dans un instrument ressemblant à une bouteille, à attendre un certain temps, puis à compter combien il en reste. Tandis que dans la seconde, un faisceau de neutrons est généré et le nombre de protons produits par la désintégration des neutrons compté. Cependant, ces approches offrent systématiquement des valeurs différentes : respectivement 14 minutes et 39 secondes et 14 minutes et 48 secondes.

Si cet écart de neuf secondes semble minime, les implications sont considérables pour toute une série de calculs importants en physique. Plus étrange encore, la différence n’a fait que s’accentuer à mesure que chaque méthode devenait plus précise, et il n’y a pas de chevauchement entre leurs intervalles. Ce qui pourrait indiquer que l’une d’entre elles est bancale, que les scientifiques surestiment leurs connaissances ou que des éléments physiques inconnus interfèrent.

Le détecteur de neutrons ultrafroids utilisé dans le piège « baignoire » — © Los Alamos National Lab / Michael Pierce

« Le processus via lequel un neutron se ‘désintègre’ en un proton, avec l’émission d’un électron léger et d’un neutrino presque sans masse, est l’un des processus les plus fascinants que connaissent les physiciens », explique Daniel Salvat, auteur principal de la nouvelle étude. « L’effort pour mesurer cette valeur de façon très précise est significatif car la connaissance de la durée de vie précise du neutron peut nous renseigner sur la façon dont l’Univers s’est développé, et permettre aux physiciens de découvrir des failles dans notre modèle de l’Univers subatomique. »

14 minutes et 37,75 secondes

Dans le cadre de récents travaux publiés dans la revue Physical Review Letters, Salvat et ses collègues du Laboratoire national de Los Alamos ont obtenu la mesure la plus précise de la durée de vie du neutron libre. Celle-ci a été réalisée au cours d’une expérience « en baignoire », constituant une variation de la méthode de la bouteille. Baptisée UCNtau, celle-ci a impliqué le refroidissement des neutrons à un niveau proche du zéro absolu (UCN signifiant « Ultracold Neutrons »), qui ont ensuite été placés dans un instrument les faisant léviter grâce à des milliers d’aimants.

Après 30 à 90 minutes, les scientifiques ont compté les neutrons survivants pour déterminer leur durée de vie moyenne. Environ 40 millions d’entre eux ont été dénombrés sur deux ans, fixant la durée de vie moyenne d’un neutron libre à 14 minutes et 37,75 secondes. Les chercheurs affirment avoir obtenu ce chiffre avec une précision plus de deux fois supérieure à celle des mesures précédentes, ce qui ramène l’incertitude à seulement 0,039 %.

Une valeur aussi précise pourrait apporter des réponses à un grand nombre de questions importantes en cosmologie et en physique, notamment la façon dont les premiers noyaux atomiques se sont formés et les quantités relatives d’éléments créés dans l’Univers primitif. Il est également possible que les neutrons se décomposent en matière noire, ce qui pourrait expliquer l’écart entre les mesures de la bouteille et du faisceau.

Par Yann Contegat, le

Source: New Atlas

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