Des chercheurs suisses ont découvert un matériau semblant capable de se « souvenir » de tout l’historique des stimuli externes précédents, tels que des courants électriques. Ce composé pourrait s’avérer utile pour améliorer le stockage et le traitement des données.
Un comportement inédit
Le matériau en question, le dioxyde de vanadium (VO2), est déjà connu pour ses propriétés intrigantes. Il s’agit normalement d’un isolant, mais lorsqu’il est chauffé à 68 °C, sa structure réticulaire change, impliquant qu’il se comporte plutôt comme un métal. Ce qui en fait un excellent revêtement pour les fenêtres ou les toits qui bloquent la chaleur du soleil ou la laissent passer, en fonction du temps. Des études antérieures ont même montré qu’il pouvait conduire l’électricité mais pas la chaleur.
Dans le cadre de récents travaux publiés dans la revue Nature Electronics, une équipe de l’École polytechnique fédérale de Lausanne a découvert une autre caractéristique intrigante de ce matériau, alors qu’ils étudiaient la vitesse de transition du matériau entre ses états d’isolation et de conduction.
Si l’application d’un courant électrique à un échantillon de VO2 a comme prévu chauffé le matériau jusqu’à son point de transition, avant de revenir à son état initial une fois le courant passé, lorsqu’une seconde salve a été appliquée, la vitesse à laquelle la transition de phase est intervenue s’est révélée différente, suggérant que le matériau conserve, à la manière du cerveau humain, une sorte de mémoire persistante des stimuli auxquels il est exposé.
D’importantes implications
« Le VO2 semblait se ‘souvenir’ de la première transition de phase et anticiper la suivante », explique Elison Matioli, auteur principal de l’étude. « Nous ne nous attendions pas à voir ce genre d’effet mémoire, et cela n’a rien à voir avec les états électroniques, mais plutôt avec la structure physique du matériau. C’est une nouvelle découverte : aucun autre matériau ne se comporte de cette façon. »
Lors d’autres expériences, les chercheurs suisses ont constaté que le VO2 pouvait se souvenir d’un précédent stimulus pendant trois heures. Ceux-ci estiment que sa durée de stockage pourrait même atteindre plusieurs jours, mais ne disposaient pas des instruments appropriés pour la mesurer.
Certains matériaux étant connus pour posséder une « mémoire de forme » à différentes températures, il est probable que le dioxyde de vanadium ne soit pas le seul à présenter la capacité nouvellement décrite. Selon les auteurs de l’étude, leur découverte pourrait permettre le développement d’une nouvelle catégorie de dispositifs destinés au stockage et au traitement des données.