De nombreux effets quantiques ne peuvent être obtenus qu’à des températures extrêmement basses, ce qui limite leur exploitation dans le monde réel. Aujourd’hui, des chercheurs américains ont démontré que l’un d’entre eux se produisait dans un matériau à température ambiante.
Bromure de bismuth
Un isolant topologique présente une structure conduisant les électrons d’une manière unique. La majeure partie du matériau est un isolant, empêchant complètement le flux d’électrons de le traverser. Cependant, de fines couches à sa surface et le long de ses bords sont hautement conductrices, permettant aux électrons de circuler librement avec un rendement élevé. Compte tenu de ces propriétés étranges, les isolants topologiques peuvent héberger des états quantiques intrigants qui pourraient contribuer au développement de futures technologies quantiques.
Il y a cependant un hic : la plupart des états quantiques sont extrêmement fragiles et se brisent sous l’effet des interférences. La chaleur, ou bruit thermique, est un élément déclencheur majeur : lorsque les matériaux sont chauffés, les atomes qu’ils contiennent vibrent à des énergies plus élevées, ce qui perturbe l’état quantique. Ainsi, la plupart des expériences et des technologies basées sur des effets quantiques impliquent des températures proches du zéro absolu, afin de ralentir au maximum les mouvements des atomes. Mais cela réduit largement la portée de telles technologies.
Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Nature Materials, des chercheurs de Princeton ont découvert que des effets quantiques se produisaient à température ambiante au sein d’un composé cristallin inorganique connu sous le nom de bromure de bismuth.
Une bande interdite idéale
Il s’est avéré que ce matériau avait exactement la bonne bande interdite, une « barrière » isolante au sein de laquelle les électrons ne peuvent pas exister avec certains niveaux d’énergie. Cette dernière doit être suffisamment épaisse pour limiter le bruit thermique, mais suffisamment fine pour ne pas perturber l’effet de couplage spin-orbite des électrons, qui est essentiel à leur stabilité. Le bromure de bismuth présentait une bande interdite de plus de 200 milliélectronvolts, ce qui correspond exactement au « point idéal » pour maintenir l’état quantique stable à température ambiante.
L’équipe a confirmé sa découverte en observant ce que l’on appelle un état de bord de Hall de spin quantique clair, propriété unique à ces systèmes topologiques. Une telle percée promet notamment de faire progresser les technologies quantiques telles que la spintronique, domaine émergent codant les données dans les spins des électrons avec une efficacité supérieure à celle de l’électronique actuelle.
« Le fait que le maintien de cet état quantique ne nécessite ni pression écrasante ni champ magnétique ultra élevé permet d’envisager l’utilisation de tels matériaux pour le développement à grande échelle de la technologie quantique de prochaine génération », estime Nana Shumiya, co-auteure de l’étude. « Je pense que notre découverte fera progresser de manière significative la frontière quantique. »
Par Yann Contegat, le
Source: New Atlas
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