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Le premier ADN humain 100 % synthétique : une avancée qui pourrait reprogrammer notre compréhension du vivant

Pour la première fois, un génome humain complet sera fabriqué en laboratoire, et ça pourrait tout changer

Représentation 3D d’une molécule d’ADN en double hélice sur fond bleu
L’ADN, ou acide désoxyribonucléique, est le support universel de l’information génétique chez tous les êtres vivants. © DailyGeekShow

Créer l’ADN humain de toutes pièces, en laboratoire, sans copier la nature mais en la réécrivant : c’est l’ambition folle du projet SynHG, lancé par une équipe de chercheurs internationaux. Pour la première fois, ils veulent produire un génome humain entièrement synthétique.

Derrière cette avancée, il y a des espoirs immenses… mais aussi des inquiétudes éthiques, politiques et sociétales. Car écrire la vie, ce n’est pas anodin.

Réécrire intégralement le génome humain : un bouleversement technique et moral

Créer de l’ADN humain synthétique suscite autant d’enthousiasme que d’interrogations. Jusqu’ici, les chercheurs se contentaient d’analyser ou de modifier notre génome. Avec SynHG, ils franchissent un cap décisif : passer de la lecture à l’écriture intégrale du vivant.

Évidemment, cette démarche soulève des inquiétudes. Depuis le séquençage du génome humain et l’essor d’outils comme CRISPR, le débat sur les risques d’eugénisme et de dérives bioéthiques ne cesse de revenir. Recréer le plan de fabrication d’un humain pose des questions profondes. Jusqu’où peut-on aller ? Qui décide ? Quels garde-fous ?

Plus encore, cette capacité à générer du vivant en laboratoire remet en question notre conception même de la nature. Si l’humain devient capable de créer son propre génome, alors la frontière entre le naturel et l’artificiel s’efface peu à peu. Cela ne modifie pas seulement nos outils scientifiques. Cela bouleverse notre rapport philosophique à ce que nous sommes, à ce que signifie « être humain » dans un monde où la biologie devient programmable.

Illustration 3D d’une double hélice d’ADN rouge représentant le génome humain sur fond bleu
Le génome humain renferme des milliards de lettres codant tout ce qui fait de nous des êtres uniques. © DailyGeekShow.com

Pendant cinq ans, les chercheurs du projet SynHG vont concevoir des outils pour fabriquer et insérer dans des cellules humaines de longues séquences d’ADN. En observant comment ces séquences interagissent avec l’environnement cellulaire, ils espèrent comprendre enfin les mécanismes complexes du génome.

À terme, cette connaissance pourrait permettre de concevoir des cellules humaines résistantes à certaines maladies. Ces cellules seraient capables, par exemple, de survivre à des attaques auto-immunes ou virales. Comme le résume le professeur Jason Chin, à la tête du projet : « Les informations issues de cette synthèse pourraient être utiles pour traiter presque toutes les maladies. »

Impliquer citoyens et scientifiques dès le départ : la clé d’une recherche responsable

Heureusement, les chercheurs ne naviguent pas en terrain vierge. L’équipe de SynHG a prévu un cadre de gouvernance rigoureux : le programme Care-full Synthesis. Ce volet éthique réunit scientifiques, décideurs, représentants de la société civile. Ensemble, ils doivent penser les enjeux dès les premières étapes de la recherche.

Ce dialogue vise à éviter les dérives. Il permet aussi d’intégrer une diversité de points de vue, culturels et géographiques. Car une telle avancée ne peut se faire dans un coin de labo, sans débat ni transparence.

Le projet est piloté par le professeur Jason Chin, à l’université d’Oxford. Il bénéficie du soutien d’équipes de Cambridge, Manchester et de l’Imperial College de Londres. En parallèle, la sociologue Joy Zhang, à l’université du Kent, coordonne les enquêtes sociales et culturelles sur les perceptions de cette avancée.

De la médecine sur mesure à l’agriculture de demain : des applications vertigineuses

Si ce projet aboutit, les applications seraient immenses. En santé, il pourrait ouvrir la voie à des traitements ultra-personnalisés. Il permettrait aussi la création de cellules conçues pour réparer des organes ou combattre des maladies rares. On imagine également des greffes d’organes totalement compatibles, fabriquées à la carte.

Mais les impacts ne se limiteraient pas au médical. Dans un monde en mutation, créer des organismes génétiquement optimisés pourrait permettre de cultiver des plantes résistantes aux sécheresses. Cela pourrait aussi aider à dépolluer des sols. Le vivant devient un matériau programmable, à adapter selon les besoins.

Nous sommes peut-être à l’aube d’un nouveau chapitre de la biologie. Reste à l’écrire avec intelligence, transparence… et un solide sens de l’humilité.

Par Eric Rafidiarimanana, le

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