De nouvelles recherches suggèrent qu’un ion exotique, à même de se former dans des conditions extrêmes, pourrait contribuer à expliquer le comportement étrange des géantes glacées du Système solaire.
L’aquodiium
Les molécules d’eau pure sont quasi systématiquement constituées de deux atomes d’hydrogène, liés à un atome d’oxygène (H2O) : on estime que dans un cas sur 500 millions, les protons peuvent se déplacer entre les atomes, créant ainsi les ions hydroxyde (OH-) et hydronium (H3O+). Pour cette nouvelle étude, publiée dans la revue Physical Review B, des chercheurs russes et chinois ont identifié un nouveau type d’ion aqueux qui pourrait exister dans des conditions exotiques.
Le modèle d’hybridation sp3 prévoit que certains atomes disposent de quatre « fentes » pour se lier à d’autres atomes ou ions. Dans le cas de l’oxygène, deux de ces emplacements sont disponibles pour des atomes, souvent de l’hydrogène. Les deux autres sont occupés par des paires d’électrons, qui ne peuvent former de liaisons avec des atomes mais peuvent capturer des protons libres. Si l’ajout d’un proton supplémentaire forme de l’hydronium, le dernier emplacement reste généralement vide.
L’équipe a découvert que dans des conditions très favorables, celui-ci pouvait être comblé. À savoir : des pressions extrêmes, obligeant la matière à réduire son volume en partageant une paire d’électrons précédemment inutilisée avec un ion d’hydrogène (ou proton), et un environnement acide, susceptible de céder les fameux protons.
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— TechieTonics (@TechieTonics) June 5, 2024
Leurs simulations avancées ont montré que cela se produisait notamment lorsque de l’acide fluorhydrique et de l’eau étaient soumis à une pression d’environ 1,5 million d’atmosphères terrestres et à des températures d’environ 3 000 °C : de nouveaux ions aquodiium (H402+) ont commencé à apparaître.
Géantes gazeuses et champs magnétiques
Selon les chercheurs, ces étranges ions pourraient aider à élucider certains mystères tenaces du Système solaire. Plus particulièrement celui des champs magnétiques étranges d’Uranus et de Neptune, qui ne correspondent pas à leur rotation ou à leur centre physique. Les pressions et températures dans les entrailles des géantes de glace, similaires à celles des simulations, suggèrent que le fameux aquodiium pourrait en être à l’origine.
« L’hydrogène qui entoure le noyau rocheux de Jupiter dans ces conditions est un métal liquide : il peut s’écouler, comme s’écoule le fer fondu à l’intérieur de la Terre, et sa conductivité électrique est due aux électrons libres partagés par tous les atomes d’hydrogène pressés les uns contre les autres », explique Artem Oganov, co-auteur de l’étude.
« Sur Uranus, nous pensons que les ions d’hydrogène eux-mêmes [c’est-à-dire les protons] sont les porteurs de charges libres. Pas nécessairement en tant qu’ions H+ autonomes, mais peut-être sous la forme d’hydronium H3O+, d’ammonium NH4+ et d’une série d’autres ions. Notre étude ajoute une nouvelle possibilité, l’ion H4O2+, qui est extrêmement intéressant d’un point de vue chimique. »
Par Yann Contegat, le
Source: New Atlas
Étiquettes: eau, uranus, système solaire
Catégories: Actualités, Espace