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Une fresque rare du culte du feu exhumée dans un ancien palais au Tadjikistan

Cette découverte pourrait bien changer notre compréhension de l’une des civilisations les plus influentes de la Route de la soie

Le palais de Sanjar-Shah
Le palais de Sanjar-Shah — © Michael Shenkar

Au cœur d’un ancien palais sogdien, des archéologues ont exhumé une fresque d’une valeur inestimable. Elle révèle une scène religieuse mystérieuse, figée depuis plus de douze siècles. Cette découverte pourrait bien changer notre compréhension de l’une des civilisations les plus influentes de la Route de la soie. Explications.

Un palais au carrefour des empires

Le palais de Sanjar-Shah, situé dans la vallée fertile de Zeravshan à quelques kilomètres de Panjikent, fut au VIIIe siècle un centre politique et culturel majeur. Les ruines, repérées dès les années 1940, n’ont réellement livré leurs secrets qu’à partir de 2001, lors de fouilles approfondies.

À son apogée, sous le gouverneur omeyyade Nasr ibn Sayyār, la cité fortifiée abritait un somptueux palais, probablement résidence du dernier souverain de Penjikent avant la conquête arabe. Les découvertes effectuées sur place témoignent de son prestige : miroir chinois en bronze, boucle de ceinture dorée, mais aussi les plus anciens manuscrits arabes sur papier connus en Asie centrale.

Le site connut un destin mouvementé. Partiellement détruit par un incendie au VIIIe siècle, il fut ensuite réoccupé sous les Samanides (819-900). Cette transition illustre le passage délicat d’une Asie centrale préislamique vers un monde dominé par la culture islamique.

— © Michael Shenkar & Maria Gervais, Antiquity (2025)

La fresque du rituel du feu

C’est dans l’imposante salle rectangulaire du palais, une salle de réception de 15,6 mètres sur 19, que les archéologues ont mis au jour une trentaine de fragments peints lors de la campagne 2022-2023. Une fois réassemblés, ils ont révélé une fresque de 1,5 mètre sur 2,5 mètres, véritable fenêtre sur la spiritualité sogdienne.

La scène représente une procession solennelle. Quatre prêtres, peut-être accompagnés d’un enfant, avancent vers un autel monumental sous une arche. Le prêtre principal s’agenouille pour offrir de l’encens, tandis qu’un autre porte un padām, un couvre-bouche encore utilisé aujourd’hui dans le zoroastrisme. Les détails sont saisissants : robes ceinturées, accessoires rituels, encensoir portatif et bâtons sacrés, offrant une vision rare et concrète des pratiques religieuses locales.

Ce type de représentation est habituellement réservé aux ossuaires funéraires, et non aux murs d’un palais. Cette fresque, associée à d’autres fragments de la salle montrant des scènes de batailles et des figures démoniaques, souligne la richesse symbolique de la culture sogdienne, mêlant religion, royauté et guerre.

— © Michael Shenkar & Maria Gervais, Antiquity (2025)

Un témoignage unique du zoroastrisme sogdien

Peuple de langue iranienne, les Sogdiens jouèrent un rôle clé dans les échanges entre la Perse, la Chine et la Méditerranée du Ve au VIIIe siècle. Pourtant, peu de sources directes permettent de saisir leurs croyances. Pour le Dr Michael Shenkar, responsable des fouilles, cette fresque constitue l’une des très rares représentations de prêtres sogdiens devant un autel fixe. Elle apporte un éclairage sur leurs rituels zoroastriens à une époque de bouleversements politiques et culturels.

La peinture confirme que le clergé sogdien portait des tenues sobres, loin du faste aristocratique, et utilisait des accessoires sacrés tels que les barsoms (brindilles rituelles) ou des louches. Elle établit un lien direct entre les traditions persanes connues et leur déclinaison locale en Asie centrale.

Malgré les incendies, la réutilisation du palais et les siècles écoulés, cette fresque et les autres œuvres découvertes à Sanjar-Shah constituent un trésor inestimable. Elles témoignent du génie d’une civilisation disparue, à la croisée des mondes, dont l’héritage continue d’éclairer l’histoire de la Route de la soie.

Pour aller plus loin, sachez que des fosses vieilles de 5 000 ans en Allemagne ont révélé des rituels funéraires troublants.

Par Cécile Breton, le

Source: Arkeonews

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