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Une cartographie des cellules cancéreuses révèle l’évolution des tumeurs dans l’organisme

Ces travaux pourraient ouvrir la voie à un diagnostic et à un traitement précoces

Cancer
Image d’illustration — © libre / Wikimedia Commons

Une initiative scientifique ambitieuse apporte des informations cruciales sur la formation, l’évolution et la résistance des tumeurs cancéreuses. Outre de nouveaux outils et de nouvelles techniques pour les étudier, nous disposons aujourd’hui des cartes les plus complètes jamais créées pour un certain nombre de tumeurs. Ce projet de cartographie du cancer, mené par le réseau Human Tumor Atlas Network, donne des indications sur la façon dont les tumeurs malignes se développent.

Une approche révolutionnaire de l’étude des tumeurs

Le cancer, résultat de mutations génétiques qui poussent les cellules à proliférer de manière incontrôlée, a longtemps été étudié par l’analyse génétique des tumeurs. Jusqu’à récemment, ces analyses ne permettaient qu’une vue d’ensemble, fondue de toutes les cellules d’un échantillon, rendant impossible l’identification précise de chaque type cellulaire.

Désormais, grâce aux outils avancés de cartographie et à des techniques de séquençage novatrices, il est possible de détailler la composition cellulaire des tumeurs, mettant en lumière leur structure complexe et variée. Daniel Abravanel, du Dana-Farber Cancer Institute, explique ainsi que les tumeurs sont des écosystèmes qui ne se composent pas uniquement de cellules cancéreuses mais incluent aussi des cellules immunitaires et des cellules de soutien, créant un réseau intriqué d’interactions.

Une équipe de chercheurs a analysé les tumeurs de près de 2 000 personnes atteintes de 20 types de cancers, grâce à des techniques avancées permettant d’isoler des cellules individuelles et d’identifier leurs fonctions spécifiques au sein des tumeurs. Ce travail méticuleux a permis de cartographier avec précision les cellules tumorales et d’observer leur organisation et leur évolution au fil du temps.

Cartographie et analyse des microrégions tumorales

Parmi les contributeurs de cette recherche, Li Ding et son équipe de l’université Washington à St. Louis ont exploré en profondeur 131 zones tumorales de 78 patients touchés par divers types de cancer, notamment du sein, du côlon et du pancréas. Utilisant une technique de séquençage cellulaire unique, ils ont pu identifier les gènes actifs dans chaque cellule. Les chercheurs ont également étudié l’organisation spatiale des cellules dans les tumeurs grâce à des microscopes puissants, permettant de reconstruire des modèles en 3D et de comprendre comment ces cellules interagissent entre elles.

Ils ont constaté que les cellules cancéreuses se regroupent en petites régions distinctes appelées microrégions, souvent influencées par des altérations génétiques similaires. Dans ces zones, les cellules immunitaires jouent également un rôle, avec une activité qui varie d’une microrégion à l’autre, ce qui semble être un facteur clé dans le développement de la résistance des tumeurs aux traitements.

Origine multicellulaire de certaines tumeurs

Un autre aspect notable des recherches de l’Human Tumor Atlas Network concerne l’origine des tumeurs. Contrairement à l’hypothèse largement acceptée selon laquelle une tumeur provient généralement d’une seule cellule, Doug Winton, de l’université de Cambridge, et son équipe ont découvert que certaines tumeurs, notamment celles du côlon, peuvent provenir de multiples cellules qui coopèrent pour former des amas cancéreux. Cette découverte a été rendue possible par l’utilisation de souris génétiquement modifiées, dans lesquelles les cellules deviennent colorées lorsqu’elles se transforment en cellules cancéreuses. Environ 40 % des tumeurs du côlon observées avaient cette origine multicellulaire.

Ken Lau de l’université Vanderbilt a également apporté sa contribution à cette découverte en identifiant des biomarqueurs permettant de suivre l’évolution des tumeurs et de créer une chronologie moléculaire de leur développement. Ces biomarqueurs permettent ainsi de retracer les étapes de croissance d’une tumeur.

En utilisant cette méthode, les scientifiques ont examiné les premiers stades du cancer du côlon chez l’Homme et l’animal et ont découvert que jusqu’à 30 % d’entre eux avaient une origine multicellulaire. Selon M. Lau, la taille d’une lésion précancéreuse du côlon est aujourd’hui le meilleur moyen de prédire si elle se transformera en cancer. Il poursuit : « Savoir comment le cancer du côlon se développe peut nous aider à dépister les lésions précancéreuses et à détecter le cancer plus tôt. »

Une meilleure compréhension de la résistance et de la propagation des tumeurs

L’équipe d’Abravanel s’est concentrée sur l’étude de tumeurs métastatiques chez des patients atteints de cancer du sein, c’est-à-dire des tumeurs qui se sont propagées à d’autres organes. Contre toute attente, les biopsies prélevées à des moments différents chez un même patient se sont révélées génétiquement très similaires, remettant en cause l’idée que les mutations évoluent de manière significative au fil du temps dans une même tumeur. 

De plus, Ben Raphael de l’université de Princeton a développé un algorithme permettant de mesurer la proportion de cellules cancéreuses et non cancéreuses dans une tumeur, ainsi que leurs interactions. Cet outil pourrait offrir une aide précieuse pour comprendre comment les cellules se répartissent et interagissent dans une tumeur, et donc comment la tumeur se développe et répond aux traitements.

L’analyse détaillée des tumeurs et de leur évolution pourrait permettre de mieux adapter les thérapies aux caractéristiques spécifiques de chaque patient, une démarche qui reste aujourd’hui complexe. Comme le souligne Abravanel, le défi actuel est d’associer le bon traitement au bon patient, en tenant compte de la dynamique spécifique de chaque cancer. Ces nouvelles cartes et outils ouvrent ainsi la voie à des traitements plus ciblés et à une meilleure compréhension des mécanismes de résistance. Par ailleurs, voici 10 choses nocives de votre quotidien que la science lie fortement au cancer.

Par Eric Rafidiarimanana, le

Source: New Scientist

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