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Théorisé par des physiciens il y a plusieurs décennies, le phénomène rendant soudainement un gaz quantique transparent a enfin pu être observé dans trois expériences indépendantes. Explications.

Le blocage de Pauli

Le blocage de Pauli se produit dans les gaz constitués d’un type de particule appelé fermion, une catégorie qui comprend les protons, les neutrons et les électrons qui composent tous les atomes. Ces particules obéissent à une règle appelée principe d’exclusion de Pauli, stipulant que deux fermions identiques ne peuvent occuper le même état quantique dans un système donné.

Lorsque les fermions d’un gaz sont fortement comprimés, tous les états quantiques sont occupés et les particules ne sont plus en mesure de se déplacer (une forme de la matière appelée « mer de Fermi »). Transmettant habituellement une quantité de mouvements aux particules lorsqu’elle est absorbée ou qu’elle rebondit sur elles, la lumière est dans ce cas forcée de passer à travers sans interagir avec le gaz.

Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Science, trois équipes distinctes ont enfin pu confirmer expérimentalement cet étrange phénomène quantique, initialement décrit il y a une trentaine d’années. « Il est très basique mais extrêmement difficile à observer », explique Yair Margalit, chercheur au MIT ayant participé à l’une des expériences. « Cela implique des conditions extrêmes, à savoir des densités élevées et des températures ultra-basses, qu’il est très difficile de réunir. »

Un laser a été utilisé pour étudier l’influence des effets quantiques sur la diffusion de la lumière dans un gaz ultra-froid d’atomes de strontium

« Ce même effet explique pourquoi nous ne passons pas à travers le plancher », commente Brian DeMarco, de l’université de l’Illinois. « Cette physique, qui est très difficile à observer, est présente partout et contribue à déterminer la structure et la stabilité de la matière. »

Des résultats cohérents d’une expérience à l’autre

Les trois équipes ont toutes réalisé des expériences similaires avec des atomes pris dans des pièges magnétiques, puis refroidis à une température proche du zéro absolu. Chacune a utilisé un atome différent, mais a obtenu des résultats semblables : la diffusion de la lumière sur les gaz était nettement plus faible lorsqu’ils étaient suffisamment froids et denses pour former une mer de Fermi.

« C’est une excellente chose que trois expériences aient pu être réalisées en même temps », estime Amita Deb, chercheuse à l’université d’Otago et membre de l’une des trois équipes. « Elles ont abordé le problème sous différents angles et fourni des résultats très cohérents. »

D’importantes implications

Cette découverte pourrait aider les chercheurs à étudier les atomes à haute énergie, ou « excités », qui ont tendance à se désintégrer rapidement. « Imaginez que je prenne un atome excité d’un autre endroit et que je le place dans cette mer de Fermi. Lorsqu’il essaie de quitter cet état, il n’a nulle part où aller, de sorte que sa durée de vie est artificiellement augmentée », explique Christian Sanner, chercheur à l’Institut de recherche JILA (Colorado).

Les atomes utilisés dans certains ordinateurs quantiques pouvant être extrêmement sensibles à la lumière entrante, plonger certaines parties de ces dispositifs dans une mer de Fermi pourrait diminuer cette sensibilité et les aider à maintenir leurs états quantiques plus longtemps, augmentant ainsi la stabilité des machines.

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