Des physiciens du CERN ont estimé la durée de vie du boson de Higgs avec une précision sans précédent. Comme la particule ne vit qu’une infime fraction de seconde, les scientifiques ont dû faire preuve de créativité pour réaliser cette nouvelle mesure.
Une méthode de mesure indirecte
Supposé pour la première fois dans les années 1960, le boson de Higgs, dont les interactions avec les autres particules permettent à ces dernières de gagner en masse, constituait la dernière particule élémentaire prévue par le modèle standard. Sa détection en 2012 a été l’une des percées scientifiques les plus importantes depuis un siècle, ce qui a valu aux scientifiques qui ont formulé cette idée le prix Nobel de physique 2013.
Depuis, le boson de Higgs est régulièrement produit dans le Grand collisionneur de hadrons (ayant récemment détecté ses premières particules fantômes), ce qui permet aux physiciens d’étudier ses propriétés, mais certaines d’entre elles restent difficiles à cerner avec précision. Celui-ci ne vit qu’une infime fraction de seconde avant de se désintégrer en d’autres particules, ce qui rend la mesure directe de sa durée de vie particulièrement difficile (un tel délai s’avère en effet trop court pour que la particule puisse traverser l’instrument et atteindre les détecteurs).
Pour cette nouvelle étude, les chercheurs ont donc utilisé une méthode indirecte afin de mesurer la durée de vie du boson de Higgs avec plus de précision que jamais. Ceux-ci se sont concentrés sur une propriété différente appelée largeur de masse, soit la gamme de masses que la particule peut présenter. Concrètement, plus la largeur de masse de la particule est grande, plus sa durée de vie est courte, ce qui permet aux physiciens d’estimer précisément cette dernière en s’appuyant sur une telle mesure.
210 yoctoscondes
La masse nominale du boson de Higgs (sa valeur la plus courante) est de 125 gigaelectronvolts (GeV). Mais grâce au principe d’incertitude d’Heisenberg, des versions de plus grande masse sont parfois produites. L’équipe a analysé les données du second cycle d’observation du LHC afin de calculer le rapport entre les bosons de Higgs « on-shell » (ceux dont la masse est proche de la masse nominale) et les bosons de Higgs « off-shell » (dont la masse est beaucoup plus élevée que d’habitude).
Grâce à cette technique, la durée de vie du boson de la particule a été estimée à 210 yoctosecondes, (22 zéros après la virgule). L’incertitude de cette valeur est de (+2,3/-0,9) x 10-22 secondes, ce qui en fait la mesure la plus précise de la durée de vie du boson de Higgs à ce jour.
« Notre résultat démontre que la production de bosons de Higgs off-shell offre un excellent moyen de mesurer la durée de vie du boson de Higgs », déclare le physicien Pascal Vanlaer. « Et cela pose un jalon dans l’étude des propriétés de cette particule unique. La précision de la mesure devrait s’améliorer dans les années à venir grâce aux données des prochains passages du LHC [le prochain cycle d’observation devrait débuter en 2022] et à de nouvelles méthodes d’analyse. »
Par Yann Contegat, le
Source: New Atlas
Étiquettes: mesure, duree-de-vie, boson-de-higgs, cern, grand collisionneur de hadrons, LHC
Catégories: Sciences physiques, Actualités