
Au cœur de la plaine de Salisbury, Stonehenge continue de surprendre les chercheurs. Parmi les innombrables trouvailles faites sur ce site, une mâchoire de vache découverte il y a plus d’un siècle paraissait n’être qu’un détail secondaire. Or, un fragment de dent issu de cette même mâchoire vient aujourd’hui bouleverser les certitudes des archéologues. Grâce à l’analyse chimique de son émail, il s’avère que cette vache ne provenait pas du Wiltshire, mais de régions bien plus lointaines, possiblement du pays de Galles.
Un « journal intime » inscrit dans l’émail
Des chercheurs du British Geological Survey, de l’université de Cardiff et de l’University College London ont analysé la troisième molaire de la vache en examinant neuf couches successives d’émail. Chaque couche, formée sur environ six mois, conserve la trace chimique du mode de vie et de l’alimentation de la vache. Les résultats de l’étude ont été publiés dans le Journal of Archaeological Science.
Les isotopes d’oxygène ont permis de déterminer que la dent croissait entre l’hiver et le milieu de l’été. Les isotopes de carbone ont montré que l’animal passait des forêts en hiver aux prairies ouvertes en été.
Mais c’est surtout l’étude des isotopes de strontium et de plomb qui a fourni les informations les plus précieuses. Les données excluent la région de la plaine de Salisbury (où se trouve Stonehenge) et pointent vers des régions riches en roches paléozoïques, comme le pays de Galles. Cela confirme que cette vache n’a pas grandi près de Stonehenge. Selon le professeur Jane Evans, du British Geological Survey, « étant donné le lien avec Stonehenge, il est probable que cette vache provienne du pays de Galles ».

Le rôle possible du bétail dans le transport des pierres
Si cette hypothèse est correcte, le parcours de cette vache, ou du moins de ses restes, aurait couvert plus de 160 kilomètres. Mais cette découverte relance un vieux débat sur la manière dont les constructeurs néolithiques ont déplacé des mégalithes pesant plusieurs tonnes sur de si longues distances.
Selon le professeur Michael Parker Pearson, un spécialiste de la préhistoire britannique, cette nouvelle découverte suggère que des vaches ont peut-être été utilisées pour aider à transporter les pierres.
Jusqu’à récemment, on pensait que le bétail néolithique n’était pas utilisé comme bête de somme. Cependant, des analyses récentes montrent que certaines ossatures bovines présentent des signes compatibles avec le port de charges lourdes. De plus, l’enterrement de la mâchoire à l’entrée cérémonielle de Stonehenge indique qu’elle avait une importance symbolique ou fonctionnelle.
Une vache, une femelle…et un indice biologique
L’analyse isotopique de la dent a également permis de déterminer qu’il s’agissait probablement d’une femelle. Pendant la grossesse ou l’allaitement, les vaches subissent un stress métabolique qui libère des éléments comme le plomb des os vers les dents en formation. Une signature chimique spécifique, détectée dans l’émail, correspond à ce phénomène. Selon le professeur Richard Madgwick, de l’université de Cardiff, « cette étude biographique d’un seul animal ajoute une dimension totalement nouvelle à l’histoire de Stonehenge ».
Les restes de la vache, datés au radiocarbone, indiquent qu’elle est morte bien avant d’être enterrée à Stonehenge. Sa mâchoire aurait pu être conservée pendant des décennies, voire des siècles, avant d’être déposée rituellement. Cela renforce l’idée que la construction de Stonehenge nécessitait des efforts massifs et coordonnés.
Le transport des mégalithes aurait impliqué non seulement une main-d’œuvre importante, mais également un réseau logistique complexe pour nourrir les personnes et les animaux impliqués. Des traces de plates-formes artificielles et d’outils comme des cordes et des leviers ont également été découvertes autour des carrières du pays de Galles. Par ailleurs, cette structure de 7 000 ans près de Prague est plus ancienne que Stonehenge et les pyramides.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: ZME Science
Étiquettes: stonehenge
Catégories: Actualités, Histoire