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Le grand courant de l’Atlantique Nord montre des signes inquiétants d’instabilité

Il pourrait s’approcher d’un point de basculement critique

Grand courant de l’Atlantique Nord
— © NASA’s Scientific Visualization Studio

Un immense système de courants tournants dans l’Atlantique Nord semble perdre sa stabilité. D’après une nouvelle étude, il pourrait s’approcher d’un point de basculement critique, capable de bouleverser le climat de l’hémisphère Nord. Pour le comprendre, les chercheurs ont analysé un indicateur inattendu : des coquilles de palourdes. Explications.

Un gyre essentiel à l’équilibre climatique

Le gyre subpolaire de l’Atlantique Nord, une vaste zone de circulation océanique qui transporte la chaleur vers le nord, est un rouage majeur de la circulation méridienne de retournement de l’Atlantique (AMOC). Ce système global régule les échanges thermiques entre les pôles et l’équateur.

Mais selon une étude publiée le 3 octobre dans la revue Science Advances, ce gyre aurait perdu de sa stabilité depuis les années 1950. Les chercheurs redoutent qu’il s’affaiblisse fortement au cours des prochaines décennies. « C’est très inquiétant », confie Beatriz Arellano Nava, auteure principale de l’étude et chercheuse à l’université d’Exeter. « Un affaiblissement brutal du gyre subpolaire entraînerait une hausse des phénomènes météorologiques extrêmes, surtout en Europe, ainsi que des changements dans les régimes de précipitations mondiaux. »

Le gyre subpolaire, bien qu’étroitement lié à l’AMOC, peut évoluer indépendamment de celui-ci. Un basculement de ce système aurait donc des conséquences similaires à un effondrement partiel de la circulation océanique globale, mais à une échelle moindre. Beatriz Arellano Nava rappelle toutefois que « même si les effets seraient moins catastrophiques qu’un effondrement total de l’AMOC, l’impact climatique d’un affaiblissement du gyre resterait majeur ».

Ce scénario rappelle le petit âge glaciaire (XIIIᵉ-XIXᵉ siècle), lorsque les températures ont chuté d’environ 2 °C dans l’hémisphère Nord, gelant rivières et ports d’Europe et provoquant famines et bouleversements sociaux. Si l’AMOC s’était affaibli à cette époque, le gyre subpolaire aurait joué un rôle clé dans le maintien du froid. Aujourd’hui, les conditions climatiques sont très différentes, mais les chercheurs redoutent qu’un mécanisme similaire puisse s’enclencher.

Des palourdes comme témoins du passé océanique

Pour sonder l’histoire du gyre, l’équipe d’Arellano Nava a étudié les coquilles fossilisées de deux espèces de palourdes de l’Atlantique Nord (Arctica islandica et Glycymeris glycymeris). Comme les cernes d’un arbre, leurs couches successives conservent la mémoire chimique de l’océan : variations de température, de salinité et de circulation.

En compilant 25 ensembles de données couvrant les 150 dernières années, les chercheurs ont détecté deux périodes de forte instabilité. La première vers 1920, la seconde à partir des années 1950 jusqu’à aujourd’hui. Le signal le plus récent semble confirmer que le gyre approche d’un point de basculement sous l’effet du réchauffement climatique, tandis que la période d’instabilité du début du XXᵉ siècle pourrait correspondre à une phase de récupération après le petit âge glaciaire.

« Les coquilles indiquent une perte de stabilité suivie d’un changement rapide, typique d’un signal d’alerte précoce avant une transformation brutale du système », explique la chercheuse.

Un avertissement encore débattu

Tous les spécialistes ne partagent pas cette interprétation. David Thornalley, océanographe à l’University College London, salue la précision des données issues des palourdes, mais reste prudent. « L’étude ne prouve pas de lien direct entre ces signaux et les caractéristiques physiques du gyre. Je reste sceptique quant à l’idée d’un basculement en cours. »

Malgré ces réserves, Beatriz Arellano Nava et son équipe poursuivent leurs travaux pour affiner les projections. « Nous ne savons pas exactement où se situe le point de bascule », conclut-elle. « Il pourrait concerner l’AMOC, mais nous pourrions d’abord observer un affaiblissement du gyre subpolaire. Et cela, en soi, serait déjà très préoccupant. »

Par ailleurs, le seuil de sécurité est franchi, la Terre dépasse une 7e limite écologique et les conséquences pourraient être irréversibles.

Par Cécile Breton, le

Source: Live Science

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