Des expériences ont montré qu’un minuscule champignon utilisé dans la cuisine traditionnelle javanaise était capable de se développer sur de nombreux aliments destinés à être jetés et permettait d’en changer radicalement le goût.
Neurospora intermedia
Présentant une teinte orangée, l’espèce fongique Neurospora intermedia est utilisée depuis des siècles pour fabriquer l’oncom, consommé par les habitants de la partie occidentale de l’île de Java. Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Nature Microbiology, Vayu Hill-Maini, de l’université de Californie, a invité des consommateurs danois à goûter pour la première fois un aliment traditionnel à base d’okara, sous-produit de la fabrication de lait de soja.
Décrivant sa saveur comme « terreuse », avec un « arrière-goût de noisette », l’ensemble des sujets lui ont attribué une note supérieure à 6 sur une échelle de 9.
Constatant que N. intermedia pouvait prospérer, sans produire de toxines, sur plus d’une trentaine de types de « déchets » végétaux (marc de tomate, peau de banane…) et les transformer en « aliments nutritifs » en 36 heures, son équipe a collaboré avec les chefs de restaurants étoilés américains et danois pour créer de nouveaux plats en exploitant le pouvoir de ce champignon.
De la poubelle aux plus grandes tables
Si toutes les tentatives n’ont pas été couronnées de succès, quelques dizaines d’heures de fermentation ont permis d’obtenir un toast au goût de fromage à partir de pain rassis, et un dessert à base de vin de prune gélifié et de crème de riz non sucrée, qui figurent aujourd’hui respectivement aux cartes de l’Alchemist de Copenhague et du Blue Hill at Stone Barns, dans l’État de New York.
« Ce processus simple a modifié l’arôme et le goût des aliments de façon assez spectaculaire », souligne le chef danois Rasmus Munk. « Obtenir des saveurs de banane et de fruits marinés sans rien ajouter d’autre que ce petit champignon était inattendu. »
On estime qu’un tiers de la nourriture produite dans le monde est gaspillée, et que ce phénomène est responsable d’environ 8 % des émissions annuelles de gaz à effet de serre. Selon Hill-Maini, la possibilité d’offrir une seconde vie aux produits destinés à être jetés contribuerait à réduire significativement l’impact environnemental du secteur alimentaire.
Par Yann Contegat, le
Source: New Scientist
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