
Traduire les pensées en langage humain n’est plus une utopie. Des chercheurs ont réussi à décoder des mots directement depuis le cerveau, grâce à l’intelligence artificielle. Une avancée stupéfiante… et inquiétante ?
Fermez les yeux un instant. Imaginez que l’on puisse entendre vos pensées. Non pas de manière vague ou intuitive, mais littéralement : capter vos mots intérieurs et les traduire, en temps réel, en langage articulé. Ce fantasme de science-fiction vient de faire un bond spectaculaire vers la réalité. Et c’est l’intelligence artificielle qui tient le micro.
En Australie, un simple casque lit les mots silencieux dans votre tête
Direction l’université de technologie de Sydney, où l’équipe du professeur Chin-Teng Lin travaille sur une approche non invasive. Le principe est simple en apparence : un volontaire porte un bonnet bardé de 128 électrodes EEG. On lui demande de lire des mots mentalement, ou de les mimer avec les lèvres sans émettre un son.

Ce geste, aussi anodin qu’il paraît, provoque une activité électrique particulière dans le cerveau. Toutefois, ces signaux sont flous, chaotiques, superposés. C’est précisément à ce stade qu’intervient l’IA, chargée de filtrer le bruit, analyser les motifs et deviner les mots les plus probables.
Ensuite, un modèle de langage de type GPT prend le relais. Il corrige les erreurs, reconstitue la phrase et rend le tout compréhensible. Ainsi, une pensée intérieure se transforme en phrase intelligible. Le résultat est bluffant : 75 % de précision, avec pour ambition d’atteindre 90 %, un niveau comparable aux implants chirurgicaux. Et tout cela, sans ouvrir le crâne.
Aux États-Unis, un implant redonne la voix à un patient paralysé
Pendant ce temps, de l’autre côté du Pacifique, des chercheurs de l’université de Californie à Davis ont exploré une autre voie : l’implant cérébral profond. Contrairement à la méthode australienne, celle-ci repose sur 256 électrodes directement insérées dans le cerveau d’un patient atteint de SLA, une maladie neurodégénérative l’ayant privé de parole.
Grâce à une IA ultra-entraînée, ce système est capable de reconstituer en 25 millisecondes non seulement les mots pensés, mais aussi l’intonation, l’émotion et la musicalité. Ainsi, l’homme peut à nouveau tenir une conversation, plaisanter, voire fredonner.
Mais ce n’est pas tout. Les chercheurs ont utilisé d’anciens enregistrements de sa voix pour entraîner l’IA. Résultat ? La voix synthétique qu’il utilise aujourd’hui est la sienne. Celle d’avant la maladie. Il dit être heureux. Et franchement, on le comprend.
Une révolution thérapeutique… et un vertige éthique
Incontestablement, ces avancées vont transformer la vie de millions de personnes privées de parole ou de mouvement. De plus, elles ouvrent la voie à des interactions inédites entre le cerveau humain et les machines.
Cependant, cette technologie soulève aussi de nombreuses questions. Car une fois que les ondes cérébrales deviennent des données exploitables, elles peuvent également devenir monétisables. Après les données personnelles, devra-t-on protéger nos pensées ?
Par ailleurs, cette frontière entre médecine et augmentation de l’humain devient floue. Contrôler un ordinateur, une maison connectée, ou un véhicule par la pensée n’est plus une idée futuriste. C’est déjà une possibilité technique.
Nous vivons donc un moment charnière. Entre la promesse médicale et le spectre du transhumanisme. Entre la technologie salvatrice et la tentation d’un monde où nos cerveaux deviendraient des interfaces ouvertes. Fascinant, déroutant… mais absolument réel.