Réveiller des personnes en état de mort cérébrale en ranimant leur cerveau. C’est le projet fou de la société américaine BioQuark, basée à Philadelphie. Avec comme objectif ultime celui de ressusciter les morts.
Une expérience folle
La nouvelle a provoqué un choc dans la communauté scientifique : dans une interview dans la revue STAT, le PDG de BioQuark, Ira Pastor, annonce l’autorisation imminente d’un » pays d’Amérique latine » pour accueillir des essais cliniques. Le but de ceux-ci seraient dans un premier temps de ramener des patients en état de mort cérébrale vers un « état de conscience minimale« . En somme, ramener des morts à la vie. Les scientifiques comptent combiner plusieurs techniques pour atteindre ce résultat.
La première est l’introduction dans le cerveau, deux fois par semaine, de cellules souches issues de leur propre graisse ou sang. En outre, les cobayes se verront quotidiennement injecté dans la moelle épinière des protéines chimiques développées en laboratoire. Ils devraient par ailleurs être soumis à un traitement au laser transcranien (connu pour ses effets neuroprotecteurs sur des personnes victimes d’AVC). Enfin, on cherchera à stimuler le nerf médian courant le long du bras (une méthode utilisée pour sortir les gens du coma). L’idée globale est que ce cocktail de méthodes devrait bien aboutir à des résultats.
Un objectif ambitieux
Un objectif bien ambitieux, tant la méthode soulève les critiques et les doutes. Ira Pastor le reconnaît lui-même : » Si une récupération complète des patients en état de mort cérébrale est bien l’objectif à long terme, ce n’est pas l’objectif principal de ce premier protocole « .
En 2016, d’ailleurs, un premier projet en Inde avait finalement été annulé au dernier moment par l’Indian Council of Medical Research (les autorités sanitaires du pays). En cause : le flou concernant les résultats attendus, justement, et l’absence d’expérimentations préalables sur des animaux.
Car, comme l’explique dans le journal Science Dean Burnett, neuroscientifique à l’Université de Cardiff, » si travaux récents ont montré que le cerveau humain et le système nerveux étaient moins fixes et irréparables que l’on pensait, l’idée que l’état de mort d’un cerveau puisse être renversé facilement est farfelue « .
Des questions éthiques
Le projet soulève surtout d’épineux problèmes d’éthique. Dans le cas où un patient s’éveillerait effectivement, comment justifier la légalité de l’expérience ? On ne peut pas avoir le consentement d’une personne légalement décédée : difficile en effet de lui faire signer des formulaires administratifs au préalable.
En outre, personne ne sait quelles seraient alors ses capacités. Probablement extrêmement faibles. Le patient pourrait se réveiller dans un état quasiment végétatif. Et qu’en est-il de leur famille ? Ne risque-t-on pas de leur donner ainsi de faux espoirs? Ou à l’inverse ne doit-on pas craindre qu’elles soient traumatisées par la situation? Plus globalement, est-il moralement justifier de réveiller une personne décédée ? Pire, de faire subir à un mort non consentant des expériences qui pourraient le ramener à la vie?
Par Tristan Castel, le
Source: Sciences et Avenir
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