De nouvelles recherches ont montré que cet organisme surprenant pouvait se souvenir de l’emplacement des aliments en modifiant le diamètre des ramifications qu’il utilise pour sonder son environnement.
Des êtres unicellulaires dotés d’une forme de mémoire rudimentaire
Cousins des amibes unicellulaires, les blobs sont des organismes gluants capables de véritables prouesses, en dépit du fait qu’ils ne possèdent ni cerveau ni système nerveux. Alors que de précédents travaux avaient révélé qu’ils étaient capables de trouver le chemin le plus court dans un labyrinthe, une récente étude parue dans la revue PNAS confirme qu’ils sont également capables de stocker des « souvenirs », et ainsi conserver une trace de l’emplacement de différentes sources de nourriture.
Lorsqu’il est placé dans un nouvel environnement, Physarum polycephalum déploie des excroissances fractales pour l’explorer et « code » les informations glanées en modifiant le diamètre de ces ramifications, ou « tubes d’exploration ». « Des recherches antérieures avaient montré que les blobs pouvaient stocker des informations au sujet d’expériences passées », explique Karen Alim, physicienne biologique à l’université technique de Munich et co-auteure de l’étude. « Mais le fait que l’architecture de leur réseau de ramifications change est un concept nouveau pour les moisissures et les champignons. »
L’observation de la moisissure visqueuse jaune vif au microscope a révélé que lorsque celle-ci trouvait de la nourriture, l’architecture de son réseau de ramifications changeait en réaction, avec certains tubes devenant plus larges et d’autres plus fins. Il s’est également avéré que ce schéma persistait longtemps après que l’organisme unicellulaire avait terminé son repas.
« La réorganisation très dynamique du réseau de P. polycephalum et la persistance de cette empreinte ont fait naître l’idée que cette architecture évolutive s’apparentait au fait de stocker des souvenirs », souligne Alim.
Une pièce importante du puzzle
En mesurant les changements de diamètre des tubes de la moisissure visqueuse lorsqu’elle trouvait de la nourriture et en simulant informatiquement le comportement de l’organisme, les chercheurs ont constaté que les tubes les plus proches d’une source de nourriture s’élargissaient tandis que ceux qui en étaient plus éloignés flétrissaient, voire disparaissaient complètement. Faisant office d’empreinte persistante, ce schéma de tubes de différents diamètres constitue une forme de mémoire rudimentaire.
Les différentes observations réalisées suggèrent que lorsque le blob détecte des aliments, il libère une substance chimique qui assouplit les parois des tubes voisins et leur permet de se dilater. N’ayant pu être déterminée, la nature de ce composé sera étudiée prochainement.
« Ces résultats constituent une pièce importante du puzzle pour comprendre cet organisme ancien et mettent en même temps en évidence les principes universels qui sous-tendent le comportement », concluent les auteurs de l’étude. « Nos découvertes laissent entrevoir plusieurs applications potentielles, dans les domaines de la conception de matériaux intelligents et de la construction de robots souples naviguant dans des environnements complexes. »
Par Yann Contegat, le
Source: Smithsonian Magazine
Étiquettes: souvenirs, blob, physarum-polycephalum, mémoire
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