Dans la lutte contre le réchauffement climatique, une question interroge : les banques sont-elles suffisamment vertes ? Au vu des demandes des ONG Les Amis de la Terre France et Oxfam France, cela ne semble pas être le cas. En effet, ces deux ONG exigent que la France force ses banques à se verdir en matière de financements, mais également de ne plus soutenir des activités qui contribuent aux changements climatiques. Les banques soulignent tout de même qu’elles ont déjà entrepris des initiatives afin de réduire leur impact énergétique.

CONTRAINDRE LES BANQUES DE CHANGER DE STRATÉGIE POUR SAUVER LA PLANÈTE

Le jeudi 28 novembre, Les Amis de la Terre et Oxfam France ont alerté la France concernant le rôle de ses banques dans le cadre du réchauffement climatique. Pour cela, ces ONG exigent de « légiférer dès 2020 » afin de les obliger à agir en faveur de la planète, et donc de limiter l’augmentation des températures à 1,5 degré supérieur au-delà de la moyenne.

Les deux ONG ont alors publié une étude détaillée de l’empreinte carbone des banques françaises. « Au nom de l’intérêt collectif, imposer une régulation financière serait un signal fort afin de limiter les impacts humains et de prévenir un risque de crise financière majeur dû aux changements climatiques », expliquent-elles. Ainsi, la France devra « garantir que les banques mettent fin à leur soutien à l’expansion des énergies fossiles et en programment la sortie totale. L’État doit garantir en priorité la sortie du secteur du charbon au plus tard en 2030 dans les pays européens et de l’OCDE, et d’ici 2040 dans le monde. »

Cette étude a été révélée la veille du colloque sur la finance verte et durable, le « Climate Finance Day ». Organisé à Paris, il a donc eu lieu le vendredi 29 novembre. A cette occasion, les établissements financiers français en profitent pour annoncer quelle stratégie ils ont déjà adoptée en matière de politique de lutte contre le réchauffement climatique.

« En 2018, les émissions de gaz à effet de serre issues des activités de financement et d’investissement des quatre principales banques françaises – BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale et BPCE -dans le secteur des énergies fossiles ont atteint plus de 2 milliards de tonnes équivalent CO2, soit 4,5 fois les émissions de la France cette même année. » Des résultats obtenus après l’analyse comparée de « l’ensemble des transactions financières réalisées par des banques françaises en direction d’entreprises actives dans les énergies fossiles en 2018 et celui des émissions de gaz à effet de serre de la France pour 2018 ».

« LE RYTHME DE MARCHE EST BIEN TROP INÉGAL ET LENT »

Face à ces accusations et contestant les méthodes de cette étude, Frédéric Oudéa, président de la Fédération bancaire française, a expliqué que « les banques françaises sont les premières engagées dans cette transition. Nous travaillons bien avec le gouvernement qui organise le cadre juridique pour vérifier que nous tenons nos engagements, cela nous va très bien. » Il a également affirmé que « quatre banques de l’Hexagone comptent parmi les dix premières du monde dans le financement des énergies renouvelables, avec une enveloppe de près de 40 milliards d’euros ». Le président souligne qu’il faut tout de même faire preuve de réalisme : « Très concrètement, on arrête de financer Air France, Renault et Peugeot ? Ou est-ce qu’on les accompagne en finançant des voitures et des avions électriques ? Les banques demandent toujours à leurs clients de leur présenter leurs actions pour modifier progressivement leur impact énergétique. »

Depuis plusieurs années, les banques françaises semblent donc avoir adopté de nouvelles stratégies afin de se désengager de plus en plus de secteurs tels que le tabac, le charbon et les sables bitumineux. Néanmoins, les ONG alertent sur le fait que « le rythme de marche est bien trop inégal et lent pour répondre aux objectifs de l’accord de Paris ». Elles soulignent notamment les « effets de communication et le rôle joué par les lobbies de la place financière parisienne pour freiner toute forme de régulation publique de leurs activités ».


BNP Paribas, mais aussi le Crédit Agricole, la Société Générale et BPCE sont désignés par l’étude — Robson90 / Shutterstock.com

« Les banques seront sensibles à la façon dont l’opinion publique peut juger leur action. Elles font preuve d’une très grande responsabilité dans leurs investissements », a quant à elle expliqué Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique, en précisant que ce rapport sera étudié.

« INTERDÉPENDANCE ENTRE BANQUIERS ET DÉCIDEURS »

Par ailleurs, Les Amis de la Terre France et Oxfam France remettent en cause « l’interdépendance entre banquiers et décideurs qui s’explique également par les nombreux passages de hauts fonctionnaires du secteur public au secteur privé et vice versa, des « portes tournantes » fonctionnant à plein régime. En 2018, les banques et leurs représentants d’intérêt ont (d’ailleurs) déclaré près de 10 millions d’euros pour influencer les décideurs nationaux, avec pas moins de 95 lobbyistes. »


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