Le réchauffement rapide de l’Arctique est un phénomène qui a captivé l’attention des scientifiques du monde entier. Parmi les régions les plus touchées, le Svalbard, un archipel norvégien situé entre la Norvège continentale et le pôle Nord, se distingue par son réchauffement accéléré. Une récente étude dirigée par François Lapointe, chercheur associé à l’université du Massachusetts (UMass Amherst), et publiée dans la revue Nature Communications, apporte des éclairages significatifs sur les raisons de ce réchauffement disproportionné.
Une anomalie climatique
L’Arctique se réchauffe rapidement, principalement à cause du changement climatique. Cependant, depuis 1991, l’archipel norvégien du Svalbard se réchauffe à un rythme alarmant, bien plus rapide que le reste de l’Arctique. Alors que le changement climatique global est un facteur évident, les scientifiques cherchaient à comprendre pourquoi cette région spécifique se réchauffe deux fois plus vite que les autres zones arctiques.
En conséquence, cette région perd une quantité considérable de glace de mer et voit augmenter ses précipitations, ce qui entraîne des glissements de terrain. Le Svalbard se réchauffe deux fois plus vite que le reste de l’Arctique, mais jusqu’à présent, les raisons de ce phénomène étaient inconnues.
« Nous voulions comprendre pourquoi le Svalbard subissait un réchauffement si intense par rapport au reste de l’Arctique », explique Raymond Bradley, professeur à l’UMass Amherst et coauteur de l’étude. Les chercheurs souhaitaient également déterminer si ces tendances allaient se poursuivre ou s’aggraver dans le futur.
Les mécanismes du blocage atmosphérique
Pour percer ce mystère, l’équipe de chercheurs s’est tournée vers les sédiments du lac Linné, situé à l’ouest du Svalbard. En examinant les dépôts sédimentaires sur une période de 2 000 ans, les scientifiques ont pu recueillir des données précieuses sur les conditions climatiques passées. Les sédiments lacustres agissent comme des archives naturelles, enregistrant les changements environnementaux sur de longues périodes.
Lapointe et son équipe ont étudié la teneur en calcium des sédiments et ont découvert que lors de fortes pluies, les carbonates du sol environnant étaient transportés dans le lac, se déposaient au fond et s’incorporaient aux sédiments. Ces sédiments servent d’archives historiques, enregistrant les régimes de précipitations des deux derniers millénaires. En comparant ces enregistrements avec les données météorologiques, l’équipe de Lapointe a trouvé une corrélation entre les deux.
« Les plus grands épisodes de pluie et de réchauffement du passé sont tous liés au blocage atmosphérique au-dessus de la Scandinavie et des montagnes de l’Oural », précise Lapointe. Ce phénomène se produit lorsqu’un système de haute pression s’installe au-dessus d’une région particulière, en l’occurrence le nord de la Scandinavie. Ce système, autour duquel l’air tourne dans le sens des aiguilles d’une montre, reste en place pendant des périodes prolongées. Simultanément, un système de basse pression se forme au-dessus du Groenland, tournant dans le sens inverse des aiguilles d’une montre.
Ces deux systèmes fonctionnent comme des engrenages imbriqués, attirant l’air chaud et humide de l’Atlantique vers l’Arctique, provoquant de fortes précipitations au Svalbard. Les observations montrent que ces schémas de blocage et les températures arctiques ont tous deux augmenté depuis le début des relevés.
L’avenir du Svalbard
Les chercheurs précisent qu’il est important de suivre l’évolution des blocages atmosphériques dans le contexte du réchauffement climatique. « Il sera très intéressant de voir comment le blocage atmosphérique se comporte avec un réchauffement supplémentaire », note Lapointe. Toute augmentation de ces schémas pourrait exacerber les effets des inondations et d’autres risques naturels au Svalbard.
L’avenir du Svalbard est préoccupant. Bien que l’archipel ait une population permanente relativement petite d’environ 2 650 habitants, il accueille plus de 130 000 visiteurs chaque année. De nombreuses espèces diverses dépendent également d’un écosystème sain. Seul le temps dira comment la région s’adaptera à l’augmentation continue des températures.
Par ailleurs, un paysage ancien vieux de dizaines de millions d’années a été découvert sous l’Antarctique.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: Newsweek
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