Aller au contenu principal

Après le mammouth laineux, la start-up Colossal Biosciences s’attaque à un nouvel exploit : ramener le moa géant à la vie

Cet oiseau de 3,5 mètres disparu il y a 600 ans pourrait bientôt fouler à nouveau les terres de Nouvelle-Zélande, grâce à l’ADN ancien et à la promesse (controversée) de la désextinction.

Chercheurs en laboratoire manipulant un échantillon génétique et observant au microscope
En pleine expérimentation : deux chercheurs analysent un échantillon dans un laboratoire spécialisé en biotechnologie avancée.

Le moa géant, colosse à plumes, fait son retour dans les plans d’une biotech ambitieuse

Avec ses trois mètres et demi de haut, ses puissantes pattes griffues et son épais manteau de plumes brunes, le moa géant était l’un des plus grands oiseaux de la planète. Incapable de voler, il a longtemps dominé les forêts de Nouvelle-Zélande… avant de disparaître peu après l’arrivée des Maoris au XIIIe siècle.

Reconstitution du moa géant dans une forêt, un oiseau disparu pouvant atteindre 3 mètres de haut
Le moa géant, disparu depuis des siècles, pourrait revenir à la vie grâce aux progrès de la biologie et des biotechnologies – DailyGeekShow.com

En moins d’un siècle, les neuf espèces de moa s’éteignent. Mais aujourd’hui, la société Colossal Biosciences, basée aux États-Unis, annonce vouloir faire revivre cet oiseau mythique.

L’entreprise, déjà connue pour ses projets autour du mammouth laineux, du dodo ou du loup géant, multiplie les annonces depuis 2024. Elle prétend pouvoir recréer des espèces disparues à partir d’ADN ancien, en s’appuyant sur des génomes fossiles combinés à ceux d’animaux vivants proches. Et cette fois, c’est le moa qui entre dans la danse.

Une stratégie de reconstitution génétique inspirée de Jurassic Park, mais version océan Pacifique

Le projet moa repose sur une idée : combiner l’ADN extrait de fossiles retrouvés en Nouvelle-Zélande avec celui d’oiseaux vivants, notamment l’émeu australien, un cousin encore bien vivant. L’émeu servirait de base génétique et biologique pour recréer un oiseau aux caractéristiques du moa.

Colossal prévoit d’implanter ces embryons dans des œufs portés par des émeus. Une fois éclos, les oiseaux seraient élevés dans des zones de réensauvagement clôturées.

Un partenariat a même été signé avec le centre de recherche Ngāi Tahu de l’université de Canterbury, en Nouvelle-Zélande. Et le projet est soutenu financièrement par Peter Jackson, le réalisateur du Seigneur des anneaux, passionné par le moa et collectionneur de ses ossements.

Selon Colossal, les premiers spécimens pourraient voir le jour d’ici cinq à dix ans. La société promet une renaissance respectueuse de l’écosystème néo-zélandais, tout en redonnant vie à une espèce emblématique.

Le retour du moa est-il possible… ou simplement médiatique ?

Les critiques n’ont pas tardé à fuser. Comme à chaque annonce de Colossal, de nombreux scientifiques s’interrogent sur la faisabilité réelle du projet. Le professeur Nic Rawlence, expert en ADN ancien à l’université d’Otago, reste sceptique : même si le moa partage des points communs avec l’émeu, les modifications génétiques nécessaires sont massives.

Illustration historique du moa géant Dinornis ingens réalisée par Lionel Walter Rothschild en 1907
Le moa géant (Dinornis ingens), représenté dans une illustration de 1907 par Lionel Walter Rothschild, faisait partie des plus grands oiseaux ayant jamais existé.

Il compare avec le « loup géant » que Colossal affirme avoir recréé. En réalité, selon lui, l’animal n’est qu’un loup gris modifié, pas un vrai retour d’une espèce disparue. Et pour le moa, ce sera pareil : « Ce ne sera jamais un vrai moa », tranche-t-il.

D’autres spécialistes dénoncent une distraction coûteuse face aux enjeux actuels. Tandis que des millions d’espèces s’éteignent sous nos yeux à cause de la déforestation, du braconnage ou du réchauffement climatique, certains jugent absurde d’investir des millions pour ramener une espèce disparue depuis des siècles. « Mieux vaudrait protéger ce qui peut encore l’être », martèlent les écologues.

Une promesse technologique fascinante, mais un débat éthique bien réel

Ramener le moa à la vie : l’idée fascine autant qu’elle dérange. Elle soulève des questions éthiques, scientifiques et environnementales profondes. Peut-on vraiment ressusciter une espèce disparue ? Que signifie « recréer » un animal si l’on ne peut lui rendre ni son comportement, ni son écosystème originel ?

Pour l’instant, la démarche de Colossal ressemble davantage à une déclaration d’intention ambitieuse qu’à un résultat concret.

Mais elle a le mérite d’interroger notre rapport à la nature, au vivant et à l’avenir de la biodiversité. Le moa géant renaîtra-t-il dans quelques années ? Rien n’est moins sûr. Mais il est déjà de retour… dans l’imaginaire collectif.

Par Eric Rafidiarimanana, le

Catégories: ,

Partager cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *