Certains aliments nourrissent, d’autres peuvent tuer. Derrière nos assiettes se cachent parfois des dangers invisibles, des toxines si puissantes qu’elles suffisent, à elles seules, à faire vaciller la frontière entre la vie et la mort. Mais alors, quel est vraiment l’aliment le plus mortel au monde ? La réponse est plus complexe qu’il n’y paraît et traverse les règnes végétal, animal et fongique. Explications.

Le manioc : le tueur caché des tropiques
Dans de nombreuses régions tropicales, le manioc amer (Manihot esculenta) est une source vitale de glucides. Mais consommé cru, il devient un poison redoutable. Ses racines et ses feuilles contiennent des glycosides cyanogéniques, qui se décomposent en cyanure lors de la digestion. En cas d’ingestion excessive ou de mauvaise préparation, cela peut provoquer goitre, paralysie… voire la mort.
Selon l’Organisation mondiale de la santé, ces intoxications tuent plus de 200 personnes par an et laissent des milliers d’autres handicapées à vie.
Heureusement, la toxicité du manioc peut être neutralisée : il suffit de le peler, le tremper dans l’eau, puis le faire bouillir ou sécher au soleil. Comme le résume le toxicologue Justin Brower, « certains aliments sont dangereux, mais peuvent être rendus sûrs grâce à une préparation appropriée. D’autres paraissent sûrs et ne le sont pas. » Le manioc appartient à la première catégorie.

Le fugu : un mets de luxe qui flirte avec la mort
Dans le règne animal, le poisson-globe japonais (fugu) détient sans doute la palme du danger.
Ce sushi raffiné, consommé au Japon, contient une toxine redoutable : la tétrodotoxine, un poison 1 200 fois plus toxique que le cyanure. À peine 2 à 3 milligrammes suffisent pour tuer un être humain.
Ses effets sont fulgurants : engourdissement, paralysie, puis insuffisance respiratoire en moins de 20 minutes.
C’est pourquoi la préparation du fugu est strictement encadrée. Seuls des chefs agréés, après plusieurs années d’apprentissage, peuvent le servir. Selon le Bureau de la santé publique de Tokyo, des dizaines de personnes tombent encore malades chaque année après en avoir mangé, mais seules quelques-unes en meurent. Malgré tout, le sashimi de fugu reste un mets d’exception, souvent facturé plusieurs centaines de dollars l’assiette.

L’amanite phalloïde : la reine meurtrière des forêts
Enfin, impossible de parler d’aliments mortels sans mentionner le champignon le plus redouté du monde : l’amanite phalloïde (Amanita phalloides). Responsable de 90 % des décès liés aux champignons, elle se distingue par sa ressemblance trompeuse avec le champignon de Paris. Une seule moitié suffit à provoquer, en quelques jours, une insuffisance hépatique ou rénale fatale.
Et nul espoir de la rendre inoffensive : la cuisson ne détruit pas ses toxines, souligne Justin Brower.
Chaque année, jusqu’à 100 décès seraient imputables à l’amanite phalloïde dans le monde, bien que les chiffres exacts soient difficiles à établir. En Californie, en 2016, plusieurs personnes ont survécu à une intoxication sévère, mais non sans séquelles.
Une lueur d’espoir toutefois : une étude publiée en 2023 suggère qu’un colorant fluorescent pourrait bientôt servir d’antidote expérimental. Une découverte qui pourrait, peut-être, faire reculer un jour ce terrible champion du règne fongique.
Par ailleurs, voici 10 plats si dangereux que vous pourriez mourir en les mangeant.