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Glaçant : la tombe d’un “enfant-vampire” datant de l’Empire romain découverte en Italie

De tout temps, l’Homme a fait face à des peurs plus ou moins réelles. Si aujourd’hui, nous considérons instinctivement les vampires, morts-vivants, zombies et autres créatures d’horreurs comme science-fiction, ce n’était pas le cas aux époques antiques et médiévales. Phénomène commun pour diverses cultures à travers le monde, véhiculée par le bouche à oreille, ces histoires et mythes terrifiaient les populations. A proximité de Rome, des archéologues ont découvert cette semaine la sépulture d’un enfant, qui fait état de cette peur générale, prise très au sérieux jadis. C’est ainsi qu’une pierre a été enfoncée dans la bouche de l’enfant, afin d’éviter son retour depuis le monde des morts.

 

Une découverte inattendue

Les faits prennent place au sein de la Nécropole des Bébés (ou La Necropoli dei Bambini dans la langue de Dante) proche de la ville de Lugnano en Italie. Plus précisément, c’est un cimetière destinés aux enfants, construit au cours du Ve siècle de notre ère.

C’est ainsi qu’à l’intérieur d’une tombe au format adapté aux bébés, de plus petite taille, des chercheurs scientifiques ont identifié le corps d’un enfant de 10 ans, décédé il y a désormais plus de 1500 ans. Le squelette, disposé sur le côté, a la bouche ouverte et enfoncée, élément loin d’être anodin. Les chercheurs pensent en effet que l’enfant, dont nous ne connaissons pas encore le genre avec certitude (bien qu’il s’agisse vraisemblablement d’une fille), est mort d’une épidémie de paludisme (malaria) mortelle qui a touché une grande partie de l’Italie du Ve siècle, à une centaine de kilomètres au nord de Rome.

Pour obtenir des informations d’un cadavre, c’est souvent vers les dents que l’on se porte. En effet, elles représentent un élément déterminant dans l’analyse d’un squelette de par les informations précises et capitales qu’elles nous apportent. Ici, un coup d’oeil suffit pour s’apercevoir qu’il y a un phénomène de dépression sur ces dernières, ce qui laisse penser qu’elles ont été forcées. De plus, la pierre trouvée à proximité présente des traces de dents. Les chercheurs affirment que la roche n’a pas pu faire son apparition à l’endroit actuel au cours des derniers 1500 ans. Ainsi, on peut facilement faire le rapprochement en imaginant qu’après la mort de l’enfant, elle a été insérée dans la bouche, ce qui expliquerait par la même occasion le fait que sa mâchoire soit restée ouverte. Les dents présentent aussi des traces de dégradations qui ressemblent à un effet secondaire connu du paludisme.

 

Des pratiques pour lutter contre l’occulte

Si cette pratique vous apparait comme étrange et irrespectueuse de la sépulture de chacun, il faut s’imaginer que la peur du surnaturel était encore plus importante que le respect de l’individu mort. En effet, il était souvent imaginé que l’âme sortait par la bouche après la mort d’un individu. Cette pratique ancienne a donc été pratiquée sur l’enfant pour l’empêcher de ressusciter et de propager la maladie et/ou d’attaquer les habitants locaux.

L’affaire reste cependant assez unique, comme en témoigne David Soren, archéologue de l’université d’Arizona, qui s’occupe des fouilles sur le site italien depuis désormais plus de 30 ans : « Je n’ai jamais rien vu de tel. C’est extrêmement étrange et bizarre. Localement, ils l’appellent le Vampire de Lugnano » ». On peut imaginer qu’insérer de force une pierre dans la cavité buccale d’un enfant n’était effectivement pas la coutume la plus répandue.

Malgré tout, nous pouvons retrouver des affaires similaires sur certains points (comme l’utilisation de pierre pour lutter contre le surnaturel) dans le voisinage, une fillette de 3 ans a été retrouvée enterrée avec de larges pierres neutralisant mains et pieds, afin de l’empêcher de revenir d’entre les morts. Diagnostiquée décédée pour cause de paludisme, cette immobilisation forcée est une manière connue de lutter contre le vampirisme. Des éléments rappelant tout de l’univers de la sorcellerie et des sciences occultes ont également été identifiés : griffes de corbeaux, os de crapaud, chaudrons en bronze en tout genre, cendres dispersées, traces de chiots sacrifiés… de quoi faire froid dans le dos. Le site de Lugnano est aujourd’hui considéré comme le centre de la sorcellerie à l’époque de l’Empire Romain.

Soren et son équipe d’archéologues ont depuis fouillé 51 autres restes d’enfants, et après examens à l’aide de tests biomoléculaires, ils ont diagnostiqué qu’ils étaient tous morts pour cause de paludisme. Mais ce n’est pas tout, les chercheurs pensent que le paludisme s’est déclaré avant leur naissance, en attaquant directement le foetus, ce qui expliquerait les morts en aussi bas-âge dans cette région. L’enfant de 10 ans que nous avons évoqué au cours de cet article est sans doute le plus vieux.

Avec ces éléments, qui peuvent apparaitre tabous d’un point de vue religieux et moral, nous pouvons situer cette communauté entre le paganisme et le christianisme. La société devait alors être terrifiée par la mort et ses inconnues liées aux maladies qui, rappelons-le,  se transmettaient plus qu’aisément. Certains archéologues expliquent que ces éléments conjugués sont des acteurs majeurs qui ont précipité la fin de l’Empire Romain, et qui ont aussi empêché l’invasion totale de l’Italie par Attila le Hun.

crédit : pixabay

 

Comment expliquer une si grande concentration de paludisme en un même lieu ?

Tout d’abord, l’hygiène durant l’Empire Romain était très approximative de par le manque de connaissance sanitaire, les avancées se feront à l’époque contemporaine. Si l’ensemble de l’Empire était fortement urbanisé, c’est aussi un lieu de concentration humaine aux organismes plus faibles, propice pour les maladies, la propagation se faisant alors aisément via les aliments et l’eau contaminée. Pour les lieux plus en marge, les marécages et marais représentaient un lieu idéal pour une population massive de moustiques ce qui expliquerait notamment le paludisme. Il faudra attendre le XIXe siècle pour se rendre compte de ces conditions favorables à l’épidémie.

crédit : flickr.com/echoes89

Si l’on retient souvent les chasses aux sorcières de l’époque médiévale qui ont conduit à l’utilisation des bûchés, il ne faut pas omettre l’Antiquité et ses peurs fondées sur une méconnaissance des causes de la mortalité chez les enfants en bas-âge. En cherchant des solutions pour préserver les populations, certains acteurs ont été amenés à pratiquer sur des cadavres des processus aujourd’hui considérés comme absurdes et étonnants…

Par Benjamin Cabiron, le

Source: gurumed

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