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Des vagues de sable géantes se déplacent sur Mars

« Aucun d'entre nous ne pensait que les vents étaient suffisamment forts »

— SciePro / Shutterstock.com

Pour la première fois, des chercheurs ont repéré de grandes vagues de sable martien en déplacement. Une découverte qui dissipe la croyance de longue date voulant que ces « mégarides » n’aient pas bougé depuis leur formation il y a des centaines de milliers d’années, et démontre également la présence de vents puissants sur la planète rouge.

« Il est assez stupéfiant que nous soyons en mesure de détecter ces changements sur Mars »

On trouve des mégarides dans les déserts sur Terre, souvent entre les dunes. Espacées de plusieurs dizaines de mètres, ces vagues sont une version plus importante des ondulations qui se produisent tous les 10 centimètres environ sur de nombreuses dunes de sable. Mais contrairement aux dunes, les mégarides sont composées de grains de sable de deux tailles. « Des grains plus gros et plus lourds recouvrent les crêtes des mégarides, ce qui complique le déplacement de ces éléments par le vent », explique Simone Silvestro, planétologue à l’Institut national italien d’astrophysique de Naples.

Depuis le début des années 2000, les rovers et les orbiteurs de Mars ont à plusieurs reprises repéré des mégarides sur la planète rouge. Mais elles ne semblent pas avoir changé de manière mesurable, ce qui a conduit certains scientifiques à penser qu’il s’agissait de reliques du passé, lorsque son atmosphère était plus épaisse et les vents qui balayaient sa surface plus puissants. À partir d’images prises par le Mars Reconnaissance Orbiter de la NASA, Silvestro et ses collègues ont montré que certaines mégarides se déplaçaient constamment, mais de façon très lente.

« Il est assez stupéfiant que nous soyons en mesure de détecter ces changements sur Mars », estime Ralph Lorenz, planétologue du laboratoire de physique appliquée de l’université Johns Hopkins n’ayant pas participé à cette recherche. « Nous pouvons maintenant mesurer des processus à la surface d’une autre planète à peine plus rapides que la pousse de nos cheveux. »

Mégarides à proximité d’une dune de sable martienne. — © NASA / JPL / University of Arizona

Une progression d’environ 10 centimètres par an

Dans le cadre de travaux présentés dans le Journal of Geophysical Research : Planet, les chercheurs se sont concentrés sur deux sites proches de l’équateur martien et ont analysé environ 1100 mégarides dans le cratère McLaughlin et 300 dans la région de Nili Fossae. En comparant les images de chaque site, prises respectivement à 7,6 et 9,4 ans d’intervalle, ces derniers ont constaté que les mégarides dans ces deux régions ont progressé d’environ 10 centimètres par an. Soit environ la vitesse à laquelle se déplacent ces vagues dans le désert de Lout en Iran.

« Découvrir que les mégarides de Mars se déplaçaient était surprenant », avance le géologue Jim Zimbelman. « Il y a quelques décennies à peine, rien ne laissait penser que les sables martiens étaient mobiles. Aucun d’entre nous ne pensait que les vents étaient suffisamment forts. » Selon l’équipe, les vents martiens pourraient accélérer le déplacement des petits grains de sable, qui commenceraient alors à rouler ou à rebondir, agissant comme des béliers frappant les grains plus gros et les mettant en mouvement. Un processus connu sous le nom de fluage par impact ayant déjà été observé sur Terre.

Le fait que les dunes de sable voisines se soient déplacées dans la même direction que les mégarides laisse penser que les premières citées ont probablement contribué à l’essor de ces vagues géantes et à leur migration. Les modèles atmosphériques actuels de Mars suggérant des vents capables de déplacer le sable particulièrement rares, ces découvertes obligeront sans doute les chercheurs à les réviser.

Silvestro prévoit d’étendre sa recherche de mégarides en mouvement à l’ensemble de la planète rouge. Véritables balises des conditions de vent y régnant, ces dernières pourraient déclencher des tempêtes de poussière susceptibles de recouvrir les panneaux solaires, réduisant leur efficacité, et également détériorer les pièces mécaniques ou obstruer les engrenages. Ce qui constituerait une mauvaise nouvelle pour les rovers martiens et les futures missions habitées.

Par Yann Contegat, le

Source: Science

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