Une tuyauterie insoupçonnée découverte sous l'Antarctique

Grâce à des cartes créées en combinant différents modèles de glaciers et de calottes glacières, des scientifiques ont découvert la manière dont l’eau s’écoule comme dans une tuyauterie sous la glace de l’Antarctique. Explications.

L’écoulement de l’eau sous la calotte glaciaire

Les experts ont utilisé des modèles informatiques afin de comprendre comment l’eau s’écoule sous la calotte glaciaire de l’Antarctique. Cela leur a notamment permis de voir à quelle vitesse les glaciers se déplacent vers l’océan. Ils ont publié les résultats de leur étude, qui les aidera à améliorer les prévisions de la stabilité de la calotte glaciaire et de l’élévation future du niveau de la mer, dans la revue Geophysical Research Letters.

Selon les modèles actuels, la fonte des glaces de l’Antarctique pourrait faire monter le niveau de la mer jusqu’à 30 centimètres d’ici 2100. Une partie de cette fonte est issue du glissement de la glace du substrat rocheux du continent vers l’océan. L’eau liquide sous la calotte glaciaire peut lubrifier la glace.

Toutefois, l’intensité de cette lubrification n’est pas uniforme sur la calotte glaciaire. En effet, elle dépend du poids de la glace, de la profondeur et de la pression de l’eau qui se trouve en dessous. Alors que les modèles de zones individuelles plus petites tiennent compte des effets de l’eau à la base de la calotte glaciaire, cette nouvelle étude est la première à l’intégrer pour l’ensemble du continent.

Deux modèles distincts

Pour simuler la manière dont l’eau de la calotte glaciaire affecte le mouvement des glaciers, les chercheurs ont combiné deux modèles existants : le modèle du système de drainage des glaciers, qui simule la manière dont l’eau s’écoule sous les calottes glaciaires, et le modèle du système de calotte glaciaire et de niveau de la mer, qui prédit la manière dont la calotte glaciaire s’écoulera et changera en réponse à divers facteurs, tels que la température.

« Le modèle combiné nous permet d’identifier où l’eau se trouve sous la glace, ou de modéliser où l’eau se trouverait sous la glace, là où elle est particulièrement épaisse et où les pressions sont suffisamment élevées pour permettre à la glace de glisser et de s’écouler plus rapidement », a déclaré Neil Ross, géophysicien à l’université de Newcastle au Royaume-Uni, qui n’a pas participé à la nouvelle étude.

Les chercheurs ont modélisé la pression effective à la base de la glace, c’est-à-dire la différence entre le poids de la glace et la pression de l’eau sous celle-ci. « Lorsque ce chiffre s’approche de zéro, nous nous approchons de la situation où la glace est pratiquement libre, flottant sur la base de l’eau », a expliqué à son tour Rupert Gladstone, glaciologue informaticien à l’université de Laponie en Finlande, qui n’a pas participé à la recherche.

Les résultats de l’étude précisant : « Le modèle a révélé que les pressions effectives les plus faibles se situent à l’intérieur du continent et sous les glaciers de sortie le long du bord de la calotte glaciaire, ce qui signifie que la glace s’écoule plus rapidement dans ces régions. Dans le même temps, les plateformes de glace flottantes autour du bord du continent ralentissent l’écoulement de la glace dans l’océan. Si ces plateformes de glace fondent, davantage de glace pourrait s’écouler du substrat rocheux vers l’océan et contribuer à l’élévation du niveau de la mer. Le modèle a également prédit avec précision l’emplacement des lacs sous-glaciaires connus dans l’ouest de l’Antarctique. Il a également prédit l’emplacement des grands canaux sous la glace où l’eau sous-glaciaire s’écoule dans l’océan. Bon nombre de ces emplacements correspondent à des zones de la plateforme de glace dont on sait qu’elles fondent rapidement, ce qui suggère que l’eau douce entrant dans l’océan par ces canaux a un impact sur les taux de fonte. »

Par ailleurs, un paysage ancien vieux de dizaines de millions d’années a été découvert sous l’Antarctique.

Par Cécile Breton, le 15 février 2025