Une nouvelle étude se penche sur le patrimoine génétique des Tardigrades. Aussi appelés Oursons d’eau, ces minuscules animaux sont extrêmement résistants. L’occasion d’étudier des mécanismes biologiques uniques.
Des animaux incroyablement résistants
Ils ne font qu’un millimètre de long. Mais que leur taille ne vous trompe pas. Ces animaux nous survivront de manière presque certaine, eux qui sont déjà vieux d’au moins 80 millions d’années. Les tardigrades sont probablement les animaux les plus résistants la planète. On peut les rencontrer sur les sommets de l’Himalaya comme dans les fosses sous-marines les plus profondes. Et pour cause : cette petite bête à 8 pattes peut survivre à des températures extrêmes, de 150 degrés jusqu’au zéro absolu (-272,8 °C ). Il survivent même au vide spatial. Ils supportent les produits les plus toxiques, et même les radiations. Leur durée de vie sans oxygène atteint 5 jours.
Plus intéressant encore, ils ont la capacité d’utiliser la cryptobiose. Lorsqu’ils font face à des situations de stress extrême, ils mettent ainsi leur organisme en état de stase. Leur métabolisme s’arrête pendant des durées presque illimitées en attendant des conditions plus favorables. On trouve ainsi des tardigrades endormis dans les calottes polaires depuis des milliers d’années. Cela leur permet ainsi de faire face à la déshydratation pendant plusieurs décennies. Lorsque l’eau revient, ils se réveillent.
L’étude du génome
Les chercheurs se sont naturellement penchés sur cet étrange phénomène. Une étude précédente avait déjà montré qu’une protéine particulière était en cause. Les scientifiques de cette nouvelle étude, publiée dans la revue PLOS, sont allé plus loin et ont voulu comprendre quel gène était responsable. Ils ont donc provoqué l’état de stase par dessiccation de deux espèces de tardigrades (c’est-à-dire en les déshydratant complètement), puis les ont réveillés. Ils ont ainsi pu observer quels gènes étaient les plus actifs.
Comme on pouvait s’y attendre, un grand nombre de gènes sont impliqués dans le processus de réparation de l’ADN. Ils ont certaines tâches dédiées comme les dommages liées à l’oxydation. En état de dessiccation, les tardigrades produisent une sorte de couche protectrice, qui les protège, et qui fond quand l’eau revient. Mais grâce à cette cartographie du génome, l’équipe a ensuite cherché à savoir à quelle famille on devait rattacher ces animaux presque indestructibles.
Un organisme très original
Depuis sa découverte au XVIIIe siècle, la question intrigue les biologistes. Cela peut être du à l’aspect si particulier de l’ourson d’eau. Ses huit pattes et son aspect de petit insecte le rapprocheraient a priori des arthropodes (crabes, insectes araignées…). Pour d’autres, ces petites pattes supportant un long corps en feraient des êtres plus proches des onychophores (la famille des vers possédant des pattes, dont le vers à soie par exemple). Après avoir étudié le génome, les scientifiques n’ont eu d’autre choix que de placer le tardigrade dans un embranchement taxonomique à son nom.
D’autres études avaient quant à elles rapproché le Tardigrade des nématodes (une autre sorte plus commune de vers). Si le consensus est loin d’être fait, c’est peut-être à cause d’une autre particularité de notre animal : il emprunte de nombreux gènes à d’autres animaux. Ce phénomène de transfert génétique horizontal est commun à toutes les espèces. Mais il prend chez lui des proportions étonnantes. Environ 17,5 % de ses gènes ont été pris chez d’autres organismes, essentiellement des bactéries.
Des applications dans les biotechnologies
Si cet animal fascine autant, c’est peut-être aussi grâce aux possibilités qu’il nous fait miroiter. De tout temps, les inventeurs se sont inspirés du vivant, et notre époque ne fait pas exception à la règle. Certains rêvent déjà de parvenir à imiter certaines de ses capacités. La résistance aux radiations et aux chaleurs extrêmes offre des opportunités évidentes, si l’on parvenait à dupliquer le mécanisme en cause. « Ce n’est qu’un début », espère Max Blaxter de l’université d’Edimbourg, l’un des auteurs de l’étude.
Mais les possibilités sont plus grandes encore. La protéine utilisée pourrait être transférée à des cultures transgéniques, ce qui les rendrait aptes à survivre à des sécheresses prolongées. La protection que ces êtres forment lorsqu’ils sont déshydratés pourrait être utilisée pour résoudre certains problèmes de température. Bref, cet animal unique n’a pas fini de nous inspirer. Et pourrait peut-être nous rendre de grands services à l’avenir.
Par Tristan Castel, le
Source: ScienceAlert
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